L’heure était un peu trop tardive. Ce qui n’était jamais bon signe. Cependant, ce n’était cela qui embêtait le plus la fillette qui se promenait dans les ruelles sombres de la ville, loin de là. A ses yeux, il n’y avait pas le moindre danger pour une enfant de neuf ans à se retrouver dans le noir ou presque, à n’être éclairée que par la faible lumière des réverbères. Ce qui l’embêtait, c’était l’absence de réaction de la part de sa famille adoptive au sujet de ses absences. Les gamins ne doivent pas être dehors à vingt et une heure, surtout lorsqu’ils n’ont personne avec eux et école le lendemain. Pourtant, à aucun moment les deux individus qui étaient sensés se charger d’elle ne semblaient de soucier de cela. Tant qu’elle rentrait saine et sauve, tout allait bien. Leur fils aîné, qui avait dix-sept ans, restait souvent très tard à regarder la télévision dans le salon et c’était lui qui avait la charge de vérifier si Justice était bien à la maison avant vingt-deux heures trente. Mais, la seule fois où elle avait dépassé cette limite en se perdant, il n’était pas allé la chercher. Elle n’avait pas non plus été punie. En fait, l’impression que la petite avait était d’être une étrangère, une invitée dont on ne se préoccupe pas vraiment.

Ses vieilles baskets résonnaient sur les pavés de la petite rue dans laquelle elle avançait. Rien ne l’intéressait outre mesure. C’était juste sa façon de passer le temps. Plus tôt, alors qu’il faisait encore jour, la gamine avait dessiné ce qui l’entourait. Là, il était un peu trop tard pour cela. D’un autre côté, ça ne la dérangeait pas, elle avait déjà assez dessiné comme ça. Son carnet était rangé dans une petite besace verte pomme avec des cerises dessus qu’elle avait presque en permanence avec elle. Le reste de sa tenue était assez simple. Un simple pantalon blanc, un t-shirt rouge avec un motif en forme d’étoile sur le devant et un gilet blanc trop grand pour elle. Porter des fringues ayant appartenu à d’autres ne lui plaisait pas mais elle savait que se plaindre n’attirerait que des problèmes. Se taire et faire semblant d’exister était ce qu’il y avait de plus simple. Au croisement de deux rues, Justice posa sa paume contre un lampadaire avant d’en faire le tour, comme une danseuse s’appuyant au bras de son cavalier. Ne vous méprenez pas, il n’y avait pas le moindre prince dans son imaginaire. Cela lui aurait demandé de l’espoir et, dans son regard bleuté, il n’y en avait pas le moindre.

Peu de personnes étaient présentes à cette heure, sauf quelques individus qui entraient et sortaient des clubs. Appuyée contre son lampadaire, celle dont le prénom signifiait trop de choses et pas assez à la fois les observait. Son regard dévia vers un jeune homme en train de recracher ses tripes un peu plus loin tandis qu’une jeune femme embrassait son amant à un autre endroit. Le monde ne lui plaisait pas. Trop sombre, trop vulgaire. Un soupir lui échappa et la petite réajusta ses lunettes, de formes rectangulaires et d’une couleur gris pâle, avant de continuer son chemin. Ici, il n’y avait rien à voir. Parfois, quelqu’un tentait de l’interpeler, de lui demander ce qu’elle faisait en ce lieu. A chaque fois, sa réponse était une esquive. Jamais elle ne cherchait à courir, juste à ignorer ceux qui demandaient cela. Par l’on ne sait quel miracle, jamais la fillette n’était tombée sur un détraqué, ce qui était plus ou moins miraculeux. Surtout avec toutes ses histoires de kidnapping d’enfants qui circulaient en ce moment. Ne regardant pas les actualités, n’y voyant aucun intérêt, Justice vivait dans l’ignorance. Ce qui était à la fois innocent et un peu effrayant également.

Et puis, après un moment, un regard à sa montre lui indiqua que l’heure tournait et qu’il fallait qu’elle rentre. Des devoirs l’attendent ainsi que son lit. Pourtant, la fatigue ne s’est pas encore emparée de sa personne. Sans doute parce qu’elle s’est habituée à avoir un cycle de sommeil étrange. Plus jeune, il lui fallait s’occuper de sa petite sœur lorsqu’elle pleurait la nuit et, en grandissant, cela avait été se lever tôt au foyer pour éviter ceux qui volaient les autres et, dans sa famille d’accueil, à cause de ses sorties nocturnes. En tout cas, cela lui permettait de sortir bien plus longtemps que les autres gamins. Avisant un banc assez simple au milieu du trottoir d’une rue déserte, elle alla s’y asseoir, juste pour être en mesure de se pencher en arrière et d’admirer les étoiles. L’infinité de ces dernières la troublait, lui donnait envie d’en être une. Une lumière guidant les gens sur la bonne voie. Bien sûr, l’idée était un brin idiote mais qu’importe. Un long soupir lui échappa et baissa la tête tout en ramenant ses genoux contre elle. Aucune envie de rentrer n’était présente dans son esprit. La décadence de ce monde l’intéressait bien plus. Le fait de pouvoir observer tout aller de travers était rassurant, en un sens. Ça lui prouvait qu’elle n’était pas la seule à posséder une vie un brin déglinguée. Son estomac émit alors un léger bruit et Justice réalisa qu’elle avait oublié de dîner. Ce n’était pas dramatique. Après tout, elle allait bientôt rentrer, dès qu’elle aurait suffisamment de courage, et pourrait déguster une glace ou un plat à placer au micro-ondes.

Il n'y avait pas un bruit. Lawrence leva la tête vers ciel sombre. Une brise fraiche vint s'infiltrer à travers ses vêtements. Il ne faisait pas froid et il n'était pas très couvert de toute façon. Il était partit tellement vite que sa veste était restée accrochée sur le dossier de la chaise de la cuisine de sa mère. Il allait la tuer cette salle garce, il le jurait. Un jour elle passerait à la moulinette et il prendrait plaisir à arracher chacun des membres de son corps. Il s'était encore disputé avec elle, oui. Il n'avait pas eu assez d'argent ce mois-ci pour payer son appart' alors il était de passage chez sa mère jusqu'à son prochain salaire. Il n'aimait jamais faire se genre de chose, revenir là-bas... Il ne considérait même pas cet endroit comme un "chez lui" mais il n'avait souvent pas trop le choix. Il en avait marre de ces sempiternelles disputes et pour qu'aucun malheurs n'arrivent trop tôt, il se cassait dans les rues. Ce soir c'était un peu différent parce qu'il était partit très loin de chez lui, dans un autre état. Il adorait rouler avec sa moto ou sa voiture, il avait l'impression d'être totalement libre. Lawrence avait roulé jusqu'en Virgine et c'était arrêté à Quantico. Il avait abandonné sa caisse sur un parking, avait fourré les clés dans ses poches et c'était mis à marcher sans plus s'arrêter jusqu'à maintenant.

Lawrence était adossé contre le mur d'une maison qui lui était inconnu dans la rue. Il n'y avait pas un chat à cette heure, même pas un seul bruit de moteur. À croire que ce coin était complètement désert. Il poussa un soupir et sembla se recroqueviller sur lui-même. Le jeune homme se laissa lentement glisser le long du mur jusqu'à s'asseoir complètement sur le sol. Ses yeux bleus se perdirent dans l'obscurité. Il ne savait vraiment pas se qu'il faisait là. Il avait sommeille même alors qu'il n'était pas non une heure si tardive que ça. Même pas vingt-deux heures sans doute. Lawrence n'avait vraiment aucune notion du temps mais sa conduite de toute la journée l'avait complètement crevé. Il aurait pu s'endormir ici comme un vieux clochard. D'ailleurs c'est se qu'il ferait sans doute vu qu'il avait à peine quelques sous dans sa poche, pas de quoi se payer à bouffer. Il ne s'en faisait pas pour le voyage du retour parce qu'il avait toujours de bidons d'essence dans son coffre ainsi que des roues de secours et une petite mallette. Il était garagiste, après tout, pas fleuriste. Law' passa un doigt sur sa barbe mal rasée et dans ses cheveux dépeignés. Il avait vraiment l'air d'un gars sortit de l'asile... Se qui était plus ou moins le cas.

Lawrence leva un peu les yeux. Quelques réverbères à moitiés casser, éclairant à peine assez pour voir le bout de son nez, s'alignaient le long de la rue. L'astre lunaire dans le ciel n'était pas transcendent même s'il procurait un petit allo argenté sur le sol. Il croyait qu'il n'aurait pas la chance de croiser qui que se soit à cette heure dans les rues, dans ce coin qui semblait désert, mais il aperçut dans les pâles lueurs une petite silhouette. Lawrence se redressa. Il s'agissait d'une fillette. Le jeune homme reposa le dos contre le mur, pas intéressant. Elle ne pourrait pas l'aider et elle était trop jeune pour assouvir ses désirs. Law' ne tuait que des étudiantes ou des femmes arrogante et qu'il appelait des "salopes". En faisant cela, il assassinait une image de sa mère encore et encore. Peut-être que s'il la tuait elle directement ce cauchemar s'arrêterait ? En tout cas, il ne levait pas la main sur les enfants. Il aimait beaucoup les enfants et en avait été un lui même un jour, pour lui ils étaient tous des victimes des adultes. Se qui intrigua Law c'est que quelqu'un laisse une enfant se promener à cette heure, toute seule...

Lawrence se releva en titubant -il avait un peu bu- , et il s'avança vers la fillette. Il ne savait pas s'il allait l'effrayer ou pas en l'abordant. Quoi qu'il en soit, il l'interpella d'une voix douce et même calme, pas trop forte ni trop basse:

-Hé petite ! Petite... Qu'est-ce que tu fais là à cette heure ? Rentres chez toi avant qu'il ne t'arrive quelque chose.

Parce que si lui n'avait aucune intention de lui faire du mal, il savait que se n'était pas le cas d'autres personnes. Il s'arrêta devant la petite fille pour la fixer droit dans les yeux. Il pensa alors qu'elle n'avait peut-être pas de chez elle ? Ou peut-être que quelqu'un l'avait foutu à la porte ? Mais en tout cas se n'était pas prudent de traîner là comme ça, dans les rues...

-On t'as foutu à la porte ?

Le problème avec les adultes, c’est qu’ils pensent avoir toujours raison, que leur expérience leur donne le droit de juger les autres et de choisir à leur place ce qui est bien ou mal. Après tout, un enfant ne sait pas ce qu’il veut, n’est-ce pas ? Quelle idée stupide. La conscience du monde des plus jeunes est juste un peu différente et certainement pas inexistante. Justice savait ce qu’elle désirait. Être avec son frère et sa sœur, retourner dans son petit appartement miteux, celui où elle avait grandi. Cependant, ses parents n’étaient pas présents dans ses plans, pour ne pas dire qu’elle ne les voyait plus dans son esprit. Certes, ils étaient encore là, mais en tant que voix. Des hurlements incessants qui la réveillait la nuit et lui donnait envie de se cacher dans un coin jusqu’au matin. Ses souhaits avaient toujours un rapport avec la liberté et, parfois, la vengeance. Parce qu’elle en voulait à ceux qui les avaient jugé, qui avaient fait enfermer son pauvre frère aîné sous prétexte qu’il était dingue, alors qu’il était juste un peu troublé. Et, chose curieuse pour une enfant, jamais Justice ne faisait de vœu. Certes, il s’en dessinait des tas dans son esprit mais ils ne sortaient jamais de ses lèvres. Comme des secrets dont on sait qu’ils ne vont pas se réaliser.

La voix la tira brusquement de ses pensées et elle sursauta, se levant immédiatement. Prise par surprise, la gamine n’avait pas le temps de jouer à esquiver la personne, parce que l’individu la regardait et qu’on ne peut fuir un regard. Cela signifie que l’on accepte de communiquer. C’était une de ses règles. L’enfant en possédait un peu trop. Elle les inventait pour oublier l’ennui et s’enfermer dans son propre monde. Fuir ce qui lui faisait peur. Même si, contrairement aux autres mômes, Justice ne craignait ni le noir ni les monstres, juste les cris et la séparation. L’homme, parce qu’il était assez âgé, paraissait un peu ailleurs. Son père était alcoolique, dont elle fut capable de voir qu’il ne semblait pas très concentré sans doute à cause de cela. Fuir aurait été une bonne solution ; après tout, cette fillette était lâche. Cependant, elle se contenta de se rasseoir sur le banc, après avoir réajusté ses lunettes, pour mieux distinguer l’autre personne. Il ne semblait pas méchant, sinon il n’aurait rien dit, il se serait contenté de lui faire du mal. Et, si cela s’était produit, elle serait restée silencieuse, parce que dans ces là, Justice savait qu’il ne fallait pas dire le moindre mot.

Et puis, ses questions n’étaient pas idiotes. D’ailleurs, l’homme avait plus ou moins tapé juste, sans le savoir. Sauf qu’on ne l’avait pas virée. C’était pire que cela. Jamais elle n’avait été la bienvenue. Tout abandonner lui paraissait être un projet dénué de sens. Elle n’était qu’une enfant après tout. Pendant quelques secondes, la petite hésita à répondre. Mais, lorsqu’elle le fit, sa voix était calme et pas vraiment effrayée.

« Bonsoir, monsieur. Ils ne se soucient pas de moi, monsieur. »

Parfois, elle appréciait de répéter certains mots, d’où son utilisation un brin exagérée du terme monsieur. Et puis, d’ailleurs, lui n’avait bien nommé petite deux fois également. Se levant, de nouveau, Justice fit quelques pas vers l’homme et lui tendit la main, comme pour le saluer. Les grands faisaient souvent ça, même si ce n’était pas quelque chose qu’elle aimait particulièrement, elle était polie.

« Si je ne rentre pas, ou si je me promène, ça ne fera aucune différence. »

L’ombre d’un sourire éclaira ses traits et il était facile de constater que ce genre d’expression était assez rare de sa part. Comme si le bonheur ne faisait pas parti de son quotidien. Ce qui était un peu triste. Surtout chez une enfant aussi jeune.

« Et puis, les étoiles sont jolies vues d’ici ! »

Parler était plus simple lorsqu’on ne lui demandait pas d’engager la conversation, ce qu’elle ne faisait presque jamais. Là, il s’agissait juste de répondre à des questions et de justifier sa présence en ce lieu. Ca, elle pouvait le faire. Même si bavarder avec un homme ayant bu aussi tard n’était pas très recommandable.

Une petite nostalgie flotta un instant sur le visage de Lawrence en voyant cette petite fille assise sur un banc. Lui même avait été enfant et bien que cette enfance n'est pas eu que des bons côtés, il devait avoué qu'il avait bien aimé les moments passés avec son père, tout innocent qu'il était à l'époque. L'enfance est normalement sacré, c'est l'époque où l'on apprend des choses, où l'on a besoin d'un modèle et où l'on a aussi besoin d'être aimé. Malheureusement, ce n'était pas le cas de tous les gamins ! La plupart des parents ne méritaient même pas de l'être ! À quoi bon vouloir et garder un enfant si c'est ensuite pour le ruer de coup et lui faire constamment subir sa mauvaise humeur ? Autant rester seul dans ces cas là plutôt que de passer sa propre souffrance sur le dos d'un autre être vivant, innocent et qui n'avait rien demandé. Law regarda l'enfant se lever du banc où elle était assise suite à ses questions. Elle répéta deux fois le mot "monsieur" dans sa phrase avant de lui tendre la main comme si elle avait elle même était une adulte pour la saluer ainsi. Lawrence fut un peu surpris mais lui rendit sa poignée de main. Il ne dit rien.

Lawrence continua de regarder la petite droit dans les yeux, comme s'il était forcé de le faire pour survivre. Il avait un peu bu, certes, mais il tenait bien l'alcool et se pensées restaient cohérentes bien que ses gestes soient un peu vaseux. La petite semblait peu se soucier de se qu'on pensait d'elle tout comme les gens semblaient en retour peut se soucier d'elle. Quelle navrante situation. Il n'y avait rien de pire que de se faire complètement ignoré. Law' remarqua son pâle sourire, elle ne semblait pas le faire tous les jours. Pourtant un enfant est censé rire à gorge déployé dans les rues avec des camarades de son âge, s'amuser à se courir après... Aux paroles de la petite, Lawrence leva les yeux vers le ciel. C'est vrai... Les étoiles illuminaient le ciel d'une rare beauté. Ce soir, il n'y avait aucun nuage là-haut pour voiler cette vue splendide.

-Il va faire froid cette nuit... C'est comme ça le ciel étoilé. Il fait toujours froid.

Lawrence parlait avec un calme presque rassurant; mais peut-être plus rassurant pour lui même que pour les autres il ne savait pas. Il s'assit à côté de la demoiselle sur le banc et reporta son attention sur elle. Il la détailla. Mais il n'arrivait pas bien à la distinguer dans la pénombre et l'alcool réduisait son champ de vision vraiment excessivement. S'il buvait vraiment trop, il lui était déjà arrivé de ne plus voir que des ombres. Bref ! On n'était pas là pour parler de ses problèmes d'alcool. Il tentait de ne pas en abuser autant que sa mère en tout cas. Alors qu'il se plongeait petit à petit dans ses pensés, il revenait par accoue à la réalité.

-Hé, petite, quel est ton nom ? Moi c'est Lawrence... Heu... Mon nom de famille on s'en fou. Enfin tu peux m'appeler Law' si ça t'amuses. J'ai personne a qui parler ce soir tu vois. Tu aimes la nuit ? C'est calme.

Lawrence avait l'impression de causer tout seul, il ne savait pas si la fille en avait quelque chose à faire de se qu'il pouvait lui dire. Mais il avait envie de parler à quelqu'un, n'importe qui, même une poule aurait fait l'affaire. Il était un peu fou, en effet, mais tant qu'il parlait, même dans le vide ça ne le dérangeait pas plus que ça. Le simple fait de prendre la parole était quelque chose de reposant pour lui, lorsqu'il le devait. Sinon il restait silencieux et attendait que les choses se passent. Il ne s'énervait que dans de très rares cas, lorsqu'il était nerveux ou bien stressé. Ses yeux bleus essayaient de traverser la petite qui semblait avoir une chevelure blonde dans la pénombre de la nuit. Il n'osa pas porter sa main vers ses cheveux pour les caresser. Ca ferait suspect, non ? Et il ne voulait pas paraître suspect. Alors il se contentait de la regarder, avec cet air un peu intrigant sur le visage.

-Mais tu ne vas pas passé ta nuit ici ? C'est pas fréquentable la nuit... Tu veux que je te raccompagne ? Enfin... Si tu veux.

Lawrence haussa les épaules. Il n'attendait pas forcément de réponse, en fait il voulait aider cette petite. Il n'aimait pas voir des enfants dont l'enfance avait été volé, se qui semblait être le cas de cette fillette. Il ne connaissait pas son passé et ce n'était pas vraiment dans ses intentions. Mais elle devait se faire maltraité par l'un de ses géniteurs ou quelque chose dans ce genre. Une fillette ne traîne pas ainsi dans la rue à une heure aussi tardive ! C'est pas possible que des parents responsables laissent faire ce genre de trucs... Law se leva, comme s'il avait quelque chose à faire et qu'il fallait que la petite se décide. En fait il n'avait rien à faire.

Cet homme était différent des autres, de ceux qu’elle croisait chaque jour et qui ne la remarquait jamais. Rien que le fait qu’il lui adresse la parole était une sorte d’anormalité. Généralement, l’enfant faisait de son mieux pour être invisible et ainsi ne pas s’attirer de problème. A chaque fois que sa voix s’échappait de ses lèvres, elle entendait les hurlements de son paternel dans son esprit. Et cela la condamnait au silence. Ce soir-là, cependant, elle osait s’exprimer. Bien sûr, son ton restait assez bas. Il n’empêchait que ce miracle était sans doute le résultat de sa routine brisée. Et puis, son aîné ne cherchait pas à faire autre chose que bavarder, donc elle n’avait aucune raison de fuir ou de l’éviter. Les enfants sont souvent intimidés par les adultes. Ce n’était pas le cas de Justice. Disons simplement que la fillette ne les comprenait pas. Et elle ne souhaitait pas être en mesure de le faire, étant persuadée que les esprits des grands étaient trop embrouillés de toute façon. Lorsque l’homme laissa échapper qu’il allait faire froid, elle répondit par un léger hochement de tête, à peine visible dans le noir. Sans trop savoir pourquoi, la gamine appréciait le ton de son aîné. Il avait quelque chose de rassurant, d’apaisant. Peut-être aussi que cela n’était qu’une façon de l’amadouer. Mais, à neuf ans, on ne fait pas trop attention à ce genre de choses.

Au lieu de lui répondre immédiatement, la fillette le laissa marquer des pauses et elle ramena ses genoux contre elle tout en essayant de mieux le distinguer dans la pénombre, ce qui n’était pas simple. Quoique, pour une fois, elle portait ses lunettes, ce qui aidait un peu. En général, la pauvre paire restait dans un tiroir depuis que des filles de sa classe avaient tenté de les casser parce qu’elle les avait bousculé par accident. Dieu que Justice pouvait détester les autres gosses…

« La nuit, les gens ne sont pas dehors à cause des monstres. Alors personne ne peut me voir. »

Ceci n’était pas le raisonnement d’un enfant. Et, même si la gamine était surdouée, ce qu’elle refusait par ailleurs de s’avouer, persuadée d’être nulle et inutile dans tous les domaines, cela ne justifiait pas vraiment de telles pensées. La petite blonde paraissait être un jeune monstre cherchant les ténèbres pour s’y cacher en attendant de devenir plus forte. Après tout, certains enfants issus de famille où il avait des violences perpétuelles devenaient des criminels. Peut-être serait-ce son cas. Une hésitation fut marquée dans sa voix et elle se tût quelques secondes, juste le temps de fixer les étoiles avant de reposer son regard sur Lawrence.

« Justice. Mais j’aime pas mon prénom. »

Il y avait des règles. Ne pas parler à un inconnu, ne pas lui dévoiler une quelconque information sur sa personne… Pourtant, la gamine ne voyait pas pourquoi il lui fallait respecter de telles conventions. Cela ne risquait pas de la protéger. Si quelqu’un devait lui faire du mal, cela arriverait. C’était la fatalité, impossible de la combattre. Lorsque l’adulte se leva, elle ne le quitta pas des yeux, une moue un peu perdue se dessinant sur ses traits enfantins. Cet individu n’était pas un policier, enfin il n’en avait pas l’air, donc il n’y avait aucun risque qu’il la raccompagne uniquement pour faire la leçon à sa famille d’accueil. Cela lui aurait attiré bien trop de problèmes. Une énorme punition. Un frisson la traversa à cette idée et elle hésita avant de répondre.

« Je veux pas y retourner... »

Sa voix avait encore baissée en intensité et une de ses mains jouait avec la lanière de sa besace. Le geste semblait être fait pour l’aider à se calmer, à ne pas y songer. Même si ce n’était pas de la peur, plutôt de la lassitude. En général, à cette heure, elle était déjà sur le chemin du retour. Quelques secondes après avoir parlé, Justice se leva et se rapprocha un peu de l’adulte, n’ayant rien à ajouter de spécial. Lui raconter sa vie serait une perte de temps. Au vu du nombre de fois où elle avait été déçue par les grands, il était hors de question qu’elle tente encore. Sa main se déposa, avec maladresse mais calme dans celle de son aîné tandis qu’elle levait son regard bleuté vers le sien.

« D’habitude, les grands ne sont pas comme toi, Law… »

Tout en disant cela, elle serra doucement les doigts de l’adulte avec les siens, comme pour le remercier. Il n’y avait pas à dire, Justice était bien trop mature pour son âge. Ce qui était loin d’être une bonne chose. Un peu plus loin dans la rue, un couple se disputait et cela attira l’attention de la blonde qui soupira, comme si cela n’avait rien d’inhabituel. Pourtant, dès que l’homme se mit à crier sur sa compagne, elle fut incapable de réprimer la vague de panique qui la traversa et elle se cacha derrière Lawrence. Ce n'était pas la scène qui l'effrayait, encore moins la violence. Juste les cris.

Les enfants imaginent tout leur monde. Ils ne comprennent les adultes la plupart du temps avec leur problèmes et leur occupations variées. Un enfant c'est tellement simple; ils ne devraient pas avoir à subir les mauvaises choses de la vie... Juste sourire avec innocence et manger des glaces. Les adultes leur laissait un monde bien compliqué sur le dos, ils devraient s'excuser de ne pas leur donner un monde meilleur. Les enfants se créent un monde, car l'imagination d'un enfant est aussi vaste qu'un océane et plus encore. Les monstres sous le lit, les fées à la fenêtre,... Néanmoins tous les enfants semblaient se briser à un certain âge, leur croyances s'envolent et il ne reste plus... que leur raison. C'était triste. Et Lawrence sourit doucement à la phrase que la jeune fille prononça, disant que personne ne sortait à cause des montres et que donc personne ne pouvait la voir la nuit. Mais peut-être ces paroles n'étaient-elles qu'une métaphore pour dire qu'elle était quelqu'un d'invisible aux yeux du monde ? Law' ne savait pas, il n'était pas psychologue, il émettait simplement des hypothèses qui lui passaient par la tête. Il distingua dans la pénombre les lunettes que la petite avait sur le nez. Elle s'appelait Justice, c'est se qu'elle dit.

Justice... Quel nom étrangement ironique pour une fille dont les parents semblaient ignoré l'existence au point de la laisser sortir à une heure aussi tardive. Y avait-il une quelconque justice la dedans ? Non... Pas tellement, n'est-ce pas ? Mais Lawrence je connaissait rien à la vie de la petite sauf qu'elle n'en avait pas l'air plus heureuse que ça. Elle avait dû en connaître des belles... Il ne la prenait pas tellement en pitié... Il la comprenait simplement. À la proposition qu'il lui fit de la raccompagner chez elle, elle répondit pas la négative. Elle ne voulait pas retourner chez elle... Comme c'était triste pour son jeune âge de déjà vouloir partir loin de sa maison. Law' la regardait toujours, il la fixait même. Il attendait qu'elle fasse peut-être quelque chose, s'en aille ? Il ne savait pas quoi lui dire. Il la fixait alors, simplement. Il constata que le ton de la voix de Justice avait encore plus baissé depuis tout à l'heure, elle ne parlait déjà pas très fort. Elle craignait que quelqu'un ne l'entende ?

Lawrence ne la quitta pas des yeux lorsqu'elle se leva pour se rapprocher de lui et pour poser sa main dans la sienne. Le jeune homme fut surpris, très surpris. Il avait peur des femmes, certes, mais elle n'était qu'une enfant qui n'avait rien fait de mal. Elle n'était pas encore une femme et elle n'était sans doute déjà plus totalement une enfant... Lawrence se leva aussi et, comme si c'était normal, il serra la main de Justice dans la sienne, comme un frère et une sœur... Ou un père et sa fille ? Law' s'en fichait, il faisait juste se qu'il devait faire. Tout ceux qui les aurait vu l'aurait peut-être prit pour un pédophile ou quelque chose dans se genre, on aurait même appelé la police si ça se trouve, surtout de nuit ! Mais Lawrence n'avait aucune attirance sexuelle ou amoureuse envers Justice. Il trouvait ça tellement immonde qu'un adulte fasse subir cela à un enfant !! Alors lui, jamais il ne ferait de telles choses. Jamais il ne violait ses victimes comme d'autre tueurs le faisait... Les doigts de Justice se serrèrent un peu sur les siens, comme ... Law' ne savait pas le mot à employer. Il n'était pas très fort dans les relations avec des enfants. Il aimait beaucoup les enfants, mais il n'était pas très habile. En général, il n'était pas leur compagnon de jeu idéale. mais les enfants qu'il connaissait étaient pour la plupart heureux de vivre, dans le quartier...

Des cris retentirent dans la rue. Lawrence tourna la tête. Il s'agissait simplement d'un couple qui se disputait. Pas très discret comme endroit, ils pourraient le faire dans un endroit plus intime. L'homme avait une voix qui portait loin, elle résonnait beaucoup. À ces cris, Justice se cacha soudainement derrière lui. Surpris, Law' tourna la tête vers elle. Elle avait peur de ces personnes ? Le jeune homme ne chercha pas trop à comprendre, peut-être qu'elle avait peur qu'on la retrouve et qu'on la ramène chez elle ? Ou elle n'aimait pas qu'on la dispute ? Lawrence se retourna vers Justice et s'agenouilla devant elle. Il lui parla avec la même voix apaisante que tout à l'heure:

-Hé ! Tu as peur qu'ils te ramènent chez toi ? Je pense qu'ils ont mieux à faire.

Lawrence regarda par dessus son épaule. Le couple était un peu plus loin et pour la pauvre vision nocturne de Law' après l'alcool, ils n'étaient que deux silhouette sombre près des maisons qui longeaient la rue. Les cris retentirent encore un moment avant que, du coin de l'œil, le jeune homme ne les vit s'embrasser. Tss ! Un couple bien pitoyable que cela. Se chamailler pour de futiles choses et se réconcilier deux minutes après... Comme ses parents autrefois, ils ne faisaient que se crier dessus et se réconciliaient pour recommencer aussitôt. Autant se séparer si on ne s'aime pas ! Lawrence retourna son attention vers Justice. Elle ne semblait pas au sommet de sa forme en tout cas. Mais il était peut-être simplement tard, non ? Enfin elle ne semblait pas vouloir rentrer chez elle...

-... Bah si tu ne veux pas rentrer je ne vais pas te forcer. Mais je n'ai pas tellement envie de te laisser seule, qu'est-ce qu'y pourrait arriver ? ... Hum... Tu as faim... Ou soif ?

Lawrence ne savait pas pourquoi il lui demandait ça. Mais si elle disait que oui il l'amènerait boire et manger un morceau quelque part dans le coin. Ca l'étonnerait qu'on fasse vraiment gaffe à un mec accompagné d'une petite par ici. Il dirait au pire qu'elle était sa sœur même si ce n'était pas vrai. Il ne voulait pas qu'elle ait des ennuie... Et il ne voulait pas en avoir non plus, soit dit en passant. Mais il n'allait tout de même pas la laisser là quand même !! Sa conscience en prendrait une sacrée claque. S'il lui arrivait quelque chose, il saurait alors qu'il aurait pu éviter un drame en restant avec elle. Se qu'il ferait... Jusqu'à se qu'elle rentre. Car les enfants finissent toujours par rentrer... Non ? Il fit quelque pas dans la rue et se retourna vers Justice pour lui tendre la main. Libre à elle de choisir se qu'elle voulait faire, il ne la forçait à rien.

-Libre à toi de choisir si tu viens... Ju'.

Le contact était rendu et cela lui semblait si étrange. Depuis combien de temps quelqu’un n’avait pas tenu sa main de cette manière ? Les adultes qui le faisaient possédaient des doigts glacés et leur poigne était trop lâche ou trop brusque, comme pour la rappeler à l’ordre en permanence. Law’ était différent. L’on aurait dit que le geste était naturel chez lui et dénué de la moindre pensée d’agacement à son égard. Il s’agissait là de la première grande personne qui lui manifestait un brin de sympathie et elle en eut presque les larmes aux yeux. Elle se retint cependant, cela n’aurait pas été très gentil pour son aîné. Ce dernier aurait pu songer qu’elle avait peur de sa présence. Et ce n’était pas du tout l’effet qu’elle souhaitait donner. Ce fut pour cela que la gamine se contenta de serrer la main du plus grand en silence. Enfin, jusqu’à entendre les cris en tout cas. Mettre des mots sur ce qu’elle ressentait ne lui était pas impossible, malgré son jeune âge. Certes, son explication aurait été un peu bancale mais cela aurait été. A force de se plonger dans des livres qui n’étaient pas de son âge, Justice assimilait un vocabulaire d’un bon niveau. Cependant la fillette ne se voyait pas donner une explication sur sa peur des cris à cet instant précis. Et elle n’était pas sûre que quelqu’un d’autre que sa propre personne était en mesure de comprendre. Alors, l’enfant se contenta d’un hochement de tête assez faible, comme pour dire qu’elle avait été rassurée par les paroles de l’adulte.

Son regard bleuté détailla le jeune homme devant elle, qui s’était baissé pour être à sa hauteur, ce qui était des plus rassurants. C’était comme si cet homme la comprenait mieux que sa famille d’accueil. En tout cas, le couple furibond venait de s’éloigner et le poids dans sa poitrine se fit fantôme au même moment. Un très faible sourire éclaira les lèvres de Justice. L’expression paraissait si maladroite que cela en était effrayant. Il fallait qu’elle apprenne à sourire. Peut-être pas ce jour-là, mais rapidement. Avant qu’il ne soit trop tard pour cela. Un jour, plus rien n’existerait, elle n’aurait plus le moindre lien, juste des regrets s’empilant dans un coin de son esprit. Ce n’était pas ce que son cœur désirait. Combien aurait-elle sacrifié pour être normale ? Pour ne pas être regardée de travers à l’école, ignorée par le reste de l’Univers et prisonnière de la solitude. Et, tandis que son esprit un peu trop mature pour son âge songeait à ça, Lawrence lui avoua qu’il ne souhaitait pas vraiment la laisser seule. Cette fois, la phrase fit que les larmes montèrent aux coins de ses yeux et elle retira ses lunettes pour les essuyer, rapidement.

« J’ai… Un peu faim. J’ai oublié de dîner. »

Oublié. Comment une enfant de neuf ans pouvait zapper une chose pareille ? Parce que sa famille d’accueil ne se souciait pas assez de sa personne pour vérifier qu’elle se sustente sans doute. Ce qui était assez terrible lorsque l’on y songeait. A aucun moment la gamine n’hésita sur ce qu’elle souhaitait faire. Justice était ainsi, un peu naïve, sans trop l’être. Juste assez pour poser sa main dans celle de Lawrence et serrer de nouveau ses doigts autour des siens avec douceur. Cela n’était pas un piège. Les monstres n’ont pas besoin de se donner autant de mal, elle ne l’ignorait pas. Dans son propre esprit, une petite créature sombre lui tenait compagnie. Chacun en possède une, il s’agit juste de décider de si on la laisse grandir et prendre le contrôle ou non. Tandis que les deux individus marchaient l’un à côté de l’autre, Justice décida de prendre son courage à deux mains et de parler un peu, même si engager la conversation lui faisait horreur.

« Tu ressembles à un ange. Un qui vient aider les gens. Mais je ne crois pas aux anges, juste aux étoiles. Si les anges existaient, ils seraient déjà venus me chercher. »

Sa façon de s’exprimer pouvait sembler étrange lorsque l’on y était pas habitué. L’enfant ne s'en rendait pas le moins du monde compte et pensait toujours être claire, même si ce n’était pas forcément le cas. C’était les gens de son âge qui avaient le plus de problème à accepter cela. Parce qu’elle n’était pas comme eux. Et le crime de la différence peut être terrible chez les plus jeunes. Ceci est à double tranchant. Soit c’est mieux accepté que chez les adultes, soit le rejet est pire. De sa main libre, Justice tenait la lanière de sa besace enfantine. Elle ne voulait pas que l’on lui vole, surtout qu’elle contenait ses dessins. Sans posséder un quelconque talent, la petite s’en sortait plutôt bien, pour une enfant. Il faut dire qu’elle avait de l’entraînement.

« Tout à l’heure… J’ai eu peur des cris. Mes parents se hurlaient toujours dessus. Alors on m’a arraché à eux, séparée de mon frère et de ma petite sœur et on m’a envoyé dans une famille où personne ne sait que j’existe… Je crois que je préférais les cris au final.»

Son bras, celui dont la main tenait celle de son aîné, se balançait doucement. Le mouvement lui paraissait apaisant et, à cet instant, la gamine regardait droit devant elle en marchant, ne voulant pas croiser les yeux du plus âgé. Oh, elle commençait à avoir un peu confiance en lui et se disait qu’il n’allait pas la juger, sauf que le doute était toujours présent. Donc, autant ne plus rien ajouter et admirer le paysage de la nuit noire. L’air se faisait frais et cela n’était pas désagréable. Ca l’aidait à rester en contact avec la réalité, à ne pas se perdre dans des songes dignes d’un conte de fées qui aurait mal tourné où la princesse aurait tué le roi et la reine avec une hache avant de manger la belle-mère. Justice n’était pas heureuse, mais le semblant de bonheur de cette promenade lui suffisait amplement.

Comment pouvait-on oublier de manger ? C'était étrange... Ou alors on ne lui avait rien préparé. Lawrence se dit alors qu'on ne devait vraiment pas beaucoup faire attention à elle à sa maison. Ce serait donc avec plaisir qu'il lui payerait quelque chose à manger. Un sandwich... Les enfants aimaient bien ce genre de petits repas, non ? Il se rappelait qu'il était toujours content lorsque son père l'emmener en manger un, ça le changeait des plats à réchauffer au micro-ondes ou des boîtes de conserves de sa mère. Ce n'était pas grand chose mais au moins le pain est frais et croustillant. Lawrence regarda Justice s'avancer vers lui et poser sa main dans la sienne pour que le contact soit de nouveau établit. Le jeune homme sera doucement les doigts de la petite dans les siens et ils commencèrent à marcher d'un rythme assez lent, comme s'ils profitaient du calme de la nuit. Law' ne savait pas si Ju' aimait bien ma nuit, cela dit. Il se rappelait parfaitement que, enfant, il avait une peur bleu du noir et croyait voir des démons et des fantômes surgirent par les trous des murs. Le silence se prolongeait mais il était loin d'être aussi gênant que dans certaine situations. Dans ce cas là, il n'y avait pas trop d'inquiétude a avoir. Ce fut Justice qui engagea néanmoins la conversation.

Elle le comparait à un ange ? Lawrence eut un sourire mélancolique qu'il tâcha de faire passer pour celui de quelqu'un d'amuser ou de quelqu'un de fier. Si on devait le comparer à quelque chose ça serait surtout à l'image d'un démon. . . Ou, pour atténuer le mot, un croque-mort. S'il avait vraiment été un ange, il n'aurait pas ressenti ce besoin de tuer des personnes. Mais peut-être était-il simplement un ange pour cette petite fille ? Parce qu'il la conduisait quelque part... Quelque par ailleurs que jusque chez elle. Si elle avait su, lui tiendrait-elle la main à cet instant même ? Pour la première fois de sa vie, Law' eut honte et ressentit une immense culpabilité de tous les crimes qu'il avait pu commettre. Bien entendu, il n'y en avait pas autant que pour certain autres tueurs en série et il le faisait avec beaucoup moins de style... Il ne prenait guère de plaisir à tuer toutes ces femmes, en réalité. Il le faisait pour détruire sa mère. C'était stupide, il aurait tout aussi bien fait de la tuer elle. Mais elle était une forme d'autorité qu'il ne pouvait approcher. Lawrence baissa les yeux sur Justice. Elle croyait aux étoiles ? Bien entendu, les étoiles brillaient haut dans le ciel... Tout le monde y croire, non ? Law' n'était sans doute pas assez doué pour interpréter des paroles de petites filles.

Elle lui expliqua soudainement la raison de sa peur de tout à l'heure. C'était à cause des cris qui avaient retenti dans la rue. Lawrence baissa à nouveau les yeux sur Justice. Elle ne le regardait pas. Avait-elle déjà dit ça à quelqu'un d'autre qu'à elle même ou à d'autres grandes personnes ? Law' ne comprenait pas pourquoi elle avait ainsi confiance en lui, mais il était mal placé pour lui faire la moral du type: "Ne parle pas aux inconnus". Lui... Il aurait sans doute suivi n'importe qui à son âge. D'où la naïveté des enfants et leur insouciance. Lawrence ne jugerait pas Justice, il était aussi mal placé pour cela. En fait, il pouvait être une oreille mais rien de plus. Il savait un peu se que c'était les cris de deux parents qui se disputent. Les siens faisaient pareille sauf qu'au lieu de leur arracher leur enfants, c'était le père qui était parti. Law' pensait que c'était mieux pour Justice d'avoir été placé en famille, même si on l'ignorait. Après... Il ne connaissait pas sa vraie famille, peut-être étaient-ils différent de la sienne, peut-être qu'il aurait mieux valu qu'elle y reste. Lawrence ne pouvait émettre qu'une multitude d'hypothèse. Leurs mains liées se balancèrent doucement. Le jeune homme gardait le silence. Ses yeux tombèrent sur le petit sac que transportait Justice. Avant de lui poser la moindre question, il entama:

-Qui sait se qui aurait été le mieux après tout ? Quand j'étais un enfant, mes parents aussi criaient.

Il ne dit rien de plus. Il voulait juste qu'elle sache que si elle avait envie de parler de quelque chose, il comprendrait un peu se qu'elle avait pu ressentir et peut-être se qu'elle ressentait toujours maintenant. Après, il n'était pas un psychologue. Il en avait assez vu de ces types lorsqu'il était allé à l'hôpital psychiatrique après le meurtre de ses grands parents. Alors il ne promettait rien, mais il tâcherait d'être une sorte "d'ami " pour Justice... Un ami d'un seul soir, sans doute. Mais il s'attachait doucement, lui qui aimait bien les enfants. Lawrence suivait la rue en ligne droite. Il y avait une grande enseigne éclairait au dessus d'un bâtiment qui indiquait: "Hôtel/Bar/Restaurant." Ils s'arrêteraient là pour qu'il achète quelque chose à manger à Justice. Il avait de l'argent au fond de ses poches, heureusement d'ailleurs. Il décida de ne rien prendre à boire s'ils entraient là-bas, il ne voulait pas se saouler devant une enfant, ce serait donner le mauvais exemple et puis ce n'était pas correct vis à vis d'elle.

Il fit un petit signe de tête en direction du sac que portait Justice alors qu'ils approchaient petit à petit de leur destination. Il lui demanda doucement:

-Que transportes-tu donc, dans ce sac ?

Oui, il se demandait bien se qu'une petite fille pouvait transporter là-dedans. Il ne savait pas si elle jouait à la poupée encore, elle semblait psychologiquement assez mature. Mais peut-être état-ce cela. Lawrence n'y connaissait pas grand chose avec les enfants. S'il avait été père, il aurait sans doute était le parfait exemple du Papa Gâteau. Mais ce n'était pas le cas, et ça ne le serait sans doute jamais comme il avait peur des femmes en règle générale. Tout en discutant un peu, ils étaient arrivés à l'endroit que Law avait repéré de loin. Il poussa la porte de sa main libre et ils entrèrent tout deux dans le lieu. Il y avait quand même quelques personnes ! Surtout des personnes qui étaient là à dîner. Quelques messieurs étaient accoudés au comptoir et secouait avec lassitude un petit verre d'alcool. Lawrence poussa gentiment et doucement Justice vers une petit table dans un coin, libre. À peine se furent-ils assit qu'un homme vint les aborder. Vu son costume, il était un serveur. Ses cheveux bruns étaient magnifiquement bien peignés sur le haut de son crâne.

-Puis-je savoir se que vous désirez, messieurs... dames ?

Il avait légèrement hésité sur le mot "dame" en voyant Justice et il avait lancé un regard interrogateur à Lawrence comme s'il était étonné de voir une petite fille debout à cette heure en sa compagnie. Law' lui répondit par un sourire poli et il tourna la tête vers Ju' pour savoir se qu'elle voulait. Lui il avait un peu faim mais il n'avait pas envie de passer commande. Il mangerait en rentrant à son appart'. En fait il était censé être revenu à Santa Cruz pour y chercher quelques affaires et retourner chez Williams, un type qu'il avait rencontré quelques temps auparavant. Finalement il s'était prit la tête avec sa mère et voilà qu'il avait rencontré cette petite fille dans une rue, une nuit. Il regarda Justice. Il se demandait se qu'il ferait d'elle une fois qu'elle aurait manger ? Il la ramènerait à ses parents adoptifs ? Le problème c'est qu'elle ne avait pas tellement envie et qu'il ne voulait pas la forcer à faire quoique se soit, même si c'était pour son bien. Si elle semblait préférer les cris à sa famille d'accueil... Mieux valait qu'elle reparte avec quelqu'un d'autre. Une idée germait dans l'esprit de Lawrence, mais il n'osait vraiment y penser.