The Mysteries of Paris
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 Une deuxième rencontre, pour apprendre à mieux se connaître. [PV : John]

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Benjamin Anderson

Benjamin Anderson

Messages : 106

Feuille de personnage
Votre job : Voleur professionnel.
Arme(s) : Un fouet ? ~
Vos relations :

Une deuxième rencontre, pour apprendre à mieux se connaître. [PV : John] Empty
MessageSujet: Une deuxième rencontre, pour apprendre à mieux se connaître. [PV : John]   Une deuxième rencontre, pour apprendre à mieux se connaître. [PV : John] Icon_minitimeVen 14 Sep - 18:27

J'veux faire de ma vie une putain d'oeuvre d'art ~

« Respire un bon coup… Comme d’habitude, tu entres, tu piques le bracelet et tu sors, fastoche… Plus personne ne dit ça de nos jours, tu commences à te faire vieux, mon grand. Avoir un gosse te rajeunit pas en plus. Ça t’apprendra à laisser tes envies de mâle primitif faire la loi dans ta vie… M’enfin là n’est pas la question ! C’est pourtant pas ton genre de délirer comme cela, qu’est-ce qui te prend ? … Non en fait, c’est ton genre. T’es complètement malade, en plein speech mental, juste devant une putain de baraque ultra protégée. Mais, bon t’es pas connu pour avoir un esprit très sain… Ton père te l’a toujours dit. Pourquoi tu penses à ton père à cet instant ? Non, en fait, tu penses à Tony, tu te dis qu’il doit s’inquiéter, qu’il te manque aussi… Et donc, ton père te revient à l’esprit, parce que c’est inévitable, tout dans ta vie te rappelle ce vieux con. C’est normal et pitoyable. Mais ce n’est absolument pas le moment ! Tu as envie de te faire tuer c’est ça ? Ce serait une solution, en effet, mais il est trop tard pour l’envisager. Comment pourrais-tu faire une chose pareille à Tony ? Tu ne pourrais pas. Tu es quelqu’un de cruel, sans remord, cela va sans dire mais pas avec lui. Jamais tu ne le serais avec Tony. D’ailleurs, tu as même arrêté d’aller voir ailleurs, si ce n’est pas une preuve de bonne volonté ça ! Tu n’as besoin de personne d’autre en vérité. Et tu sais… Du moins tu espères, que c’est aussi le cas pour Tony… Planque-toi ! Espèce de crétin ! Concentre-toi un peu ! Tu as le droit de penser à Tony, après tout… Maintenant que c’est l’amour fou, tu peux te permettre un petit écart. Mais arrête de tergiverser. Tu sais bien que ça ne t’aide pas de trop réfléchir. Alors tu fais comme d’habitude, tu fonces, tu t’amuses et tu cesses de cogiter, ça ne t’avance à rien. »

Bref, débriefing mental avec moi-même. C’était toujours un plaisir de me parler, j’avais une conversation parfaite et je m’étonnais presque de mes réponses parfois. Comme quoi, je n’avais pas besoin d’un autre que moi ! Passons. J’avais un léger problème, dès que j’étais un peu excité, j’avais les idées qui partaient dans tous les sens. J’inspirai, histoire de me détendre. Je n’étais pas vraiment au club Med en ce moment, alors je souhaitais fortement me reconcentrer. Un homme faisait des rondes autour du bâtiment depuis une bonne vingtaine de minutes. Il ne me voyait pas, évidemment. Mais il n’était pas tout seul, il se trainait une dizaine de copain, tous aussi musclés, tous aussi brutaux et tous aussi armés. Et je n’avais pas vraiment envie de me faire attraper ce soir. Mon vieil ami, Marc Dante avait fait doubler la sécurité depuis ma dernière visite. Il me semblait qu’il ne m’aimait pas beaucoup. Moi je l’appréciais au contraire. Il avait énormément de goût en matière d’art mais la plupart de ses œuvres ne lui appartenaient pas. Pourquoi ne pourrais-je en profiter ? Je volais un voleur, techniquement, ce n’était plus du vol. Bon j’avais une logique particulière… Une logique de malfrat. C’était normal. J’adorais être un criminel et penser comme tel. J’avançais, évitant le garde autour de la maison puis celui devant la fenêtre et je pénétrais dans la demeure. Au besoin, je savais me battre, c’était devenu une obligation pour moi d’apprendre à me défendre seul. Disons que j’avais un passe-temps dangereux et que puisque je m’amusais avec des mecs pas toujours très nets, je risquais ma vie à chaque fois, ou presque. C’était le jeu. C’était ça qui m’excitait. Si Tony savait cela… Inutile de l’inquiéter pour rien. J’étais le meilleur ! Et dans le pire des cas, je fracturais quelques nuques… Non je plaisantais ! Je ne tuais pas. Encore heureux. J’étais pas un monstre violent, sans cœur qui prenait son pied en assassinant des pauvres innocents. Même lorsque je me défendais, je me contentais d’assommer. Ouais c’était sans doute une pathologie. La phobie maladive que j’avais de ressembler un jour à mon paternel… A ma connaissance il n’avait jamais tué personne, mais j’avouais ne pas bien le connaître.

J’attrapai un diamant qui trainait et jonglai avec, nonchalamment. Comme si j’étais dans un café avec Tony. Je me sentais plus que bien. J’étais dans mon élément. C’était ma drogue, mon LSD, ma bouteille de vodka, ma clope après le petit-déj’, ma maîtresse cachée, mon grand moment de gloire. C’était mieux qu’être sur une scène devant des millions de fans –d’ailleurs, je n’ai jamais aimé les scènes-. Mieux que recevoir le prix Nobel de la paix –d’ailleurs, je n’en ai rien à faire de la paix-. Mieux que découvrir le remède contre le cancer, l’Alzheimer, le HIV –d’ailleurs, je ne suis pas chercheur et je n’éprouve aucune empathie envers les malades-. Mieux que faire l’amour à une femme magnifique –d’ailleurs, je suis gay maintenant-. Mieux que recevoir un baiser de Tony… C’était ma raison de vivre. L’adrénaline, les sensations extrêmes, peur et excitation mêlées, tout cela me donnait l’impression d’être vivant. Et jamais je ne pourrais y renoncer. Fort heureusement, Tony connaissait ma passion et me laissait faire, contrairement à ma belle épouse. Il était si ouvert d’esprit… C’était à la fois terrifiant et très agréable de pouvoir laisser libre cours à mes sentiments envers mon merveilleux majordome. Bref passons. Je glissai le diamant dans ma poche… Il ne trainait pas n’importe où évidemment. Je l’avais extrait de sa jolie vitrine ultra sécurisée. Comme toute cette baraque. Mais j’étais un pro de l’informatique, du piratage, du crochetage et de toutes ces choses qui faisaient de moi un voleur excellent. Le meilleur. Un brin vantard mais… Mon père m’avait toujours dit « Tu peux te la péter, quand t’as les moyens ! » … Ah non, mon père ne m’avait jamais dit cela… C’était sans doute dans un film. J’avais tendance à mélanger fiction et réalité, pour une raison toute simple : j’aurais préféré avoir une enfance sortie directement d’un film. Mais encore une fois, c’était hors propos. J’étais venu pour une raison bien précise. Je venais voler une magnifique broche en diamant ayant appartenu à Charles Eduard Stuart. Broche plus connue sous le nom de « Bonne prince Charlie », l’homme qui déclencha la bataille de Culloden en 1745. Bref un noble inconnu, excepté de moi et quelques historiens ou bijoutiers. De toute façon, c’était sa broche qui m’intéressait, elle valait un petit million de dollars, et elle était chez ce vilain Marc, qui ne la méritait nullement. Il l’avait volé à l’ancien propriétaire, le descendant de Charles. Je ne comptais pas la rendre à ce vieux Charlie –l’ironie du prénom-. Quel était l’intérêt de filer un aussi beau bijou à vieillard croulant avec un pied dans la tombe ?

Aucun. Il n’y avait aucun intérêt. Je garderais le bijou avec la pleine satisfaction de mes agissements. Qu’ils soient bons ou mauvais. Ainsi qu’avec la sensation d’être le meilleur. J’étais gagnant avant même d’avoir la broche entre mes mains. C’était une belle maladie qui s’appelait le narcissisme, l’égotisme, la vanité… Bref j’étais amoureux de mon reflet, comme Narcisse. Pour moi, c’était une qualité. C’était juste le niveau au-dessus de la confiance en soi… Et bizarrement, j’avais tout de même assez peu confiance en moi dans l’ensemble… J’étais un paradoxe à moi tout seul. Je pointai ma lampe sur un tableau et l’examinai soigneusement. Je cherchai les détails, ceux qui prouvaient que ce n’était pas un véritable Rembrandt. La peinture n’avait sans doute pas plus d’une vingtaine d’années, et les ombres me paraissaient trop accentuées par rapport à l’œuvre originale. Dommage. Je l’aurais bien pris aussi mais ce n’était qu’une copie, une copie habile mais une copie tout de même. Même mon travail pouvait donner ce résultat. N’importe qui s’y tromperait. Encore une fois, je n’étais pas n’importe qui. Et s’il y avait bien une chose que je savais faire, c’était dater des objets, reconnaître des faux, ou estimer le prix de n’importe quoi. Ce n’était pas inné, j’avais pris des cours, je m’étais renseigné. J’étais une encyclopédie de l’art, de la préhistoire à nos jours. Parce que cela me passionnait : L’histoire et l’art. Le dessin et le vol. J’étais un professionnel. Même si je ne me débrouillais que dans ce domaine-là… C’était déjà pas mal. Il ne me manquait plus qu’apprendre à écrire convenablement… J’exagérais sans doute un peu, mes livres ne devaient pas être si mauvais, sinon personne ne les lirait… Ou alors, j’étais simplement un beau gosse avec une vie palpitante, qui faisait la une des journaux au moins une fois par semaine pour un écart de conduite décadent et qui attirait les jeunes donzelles par son côté mystérieux, sauvage et macho. Dans tous les cas, c’était devenu une excellente couverture. Je gagnais presque autant des deux côtés. J’étais plus riche que la plupart des hommes et ça, ça me faisait du bien. J’avais mieux réussi ma vie que mon ascendant, j’étais multimilliardaire, j’avais une fille adorable –même si j’étais un père exécrable- et je montrais mon amour à la personne que j’aimais le plus au monde, Tony. Je me sentais bêtement fier de moi. Parce qu’en plus, il lisait sans doute tout cela dans les journaux et ça, ça me faisait monter un plaisir sadique. Je donnerais n’importe quoi pour voir sa tête quand il lisait un article sur moi. Et j’aurais tout donné pour être avec lui quand il apprendrait que je sortais avec Tony. C’était stupide, c’était inutile mais bon sang, ça m’aurait fait un bien fou !

Un violent coup de poing dans la mâchoire me ramena à moi. Je lâchai quelque chose de vulgaire comme « Ah putain ! Le con ! ». La surprise sans doute. La vulgarité n’étant pas ma tasse de thé, je ne proférais des jurons que lorsque j’étais surpris ou vraiment très énervé. Qui pouvait se targuer d’avoir réglé un conflit en hurlant « Bordel de merde, ferme-la ! » ? … J’en étais donc venu à la conclusion que jurer ne servait à rien. Le gorille s’empressa de m’attraper un poignet. Je me défis de son étreinte, si peu affectueuse, avec facilité et lui cassai le bras, tout en l’empêchant de crier. J’ajoutai à cela une prise pour qu’il perde connaissance et ni vu, ni connu, j’avais terminé en quelques secondes. Bon okay, ma vie était plus facile que celle de la plupart des gens. Je savais me défendre, j’étais doué en peinture, en maths, en gym, j’avais une culture générale à faire pâlir d’envie Hans Urs von Balthasar et en plus j’étais mignon. J’étais un peu le mec parfait quoi… Bon j’avais ma palette de défaut aussi. Mais mes facilités dans la vie, je les avais durement gagnées, et plutôt méritées, je pense. Peu de gens pouvaient comprendre ce que j’avais vécu, enfant et je savais que je méritais tout ce qui m’arrivait. J’y avais droit. J’avais le droit d’être parfait, d’être heureux, libre et amoureux. Tout cela me revenait, je le savais. J’avais bossé dur pour y arriver. Bref. Je devais me dépêcher avant que les autres gardes ne viennent me saluer. Je trouvais rapidement l’objet de ma visite. Dans une vitrine, au milieu d’une pièce, comme dans n’importe quel film d’espionnage. Je glissai entre les rayons lumineux, telle la danseuse étoile du Lac des cygnes. Comparaison douteuse et finalement peu flatteuse je dirais. Il me manquait le tutu. Je déconnectai le système de sécurité et ressortis de la demeure aussi facilement que j’y étais entré. Je volais comme je respirais… Naturellement. Je grimpai le portail avec aisance et sautai de l’autre côté. Bien évidemment, je ne m’attendais pas à retrouver un fan… Encore moins celui-là. Avant de m’approcher de lui, je caressai la broche dans l’une de mes poches et m’approchai de mon invité surprise. La curiosité était un vilain défaut !


-Alors, bonne soirée ?

Je ne sus si répondre « Excellente. » était une idée judicieuse. En fait, j’étais plutôt paniqué. Mais je ne laissais rien paraître, démarche nonchalante, attitude noble et décontractée. Je ne voulais pas montrer que j’étais quelque peu stressé. Après tout, je n’avais absolument rien à me reprocher. Oui, l’un des principes du criminel était de toujours nier, je sortais d’une demeure, qui n’était évidemment pas la mienne, je ne me promenais pas avec mon bijou en main mais presque… Mais je n’étais pas coupable ! Sans preuve, et il n’y en avait sans doute pas… A part le témoignage de monsieur le policier, l’on ne pouvait pas m’arrêter. Et puis dans le pire des cas, j’étais riche et l’argent pouvait tout payer, même ma liberté. Je lui souris. Nous n’étions largement pas les meilleurs amis du monde, j’étais persuadé qu’il me prenait pour un imbécile heureux –encore une jolie marque d’estime de mon géniteur-. Mais bizarrement, je l’aimais bien, il était froid, détestable, horriblement énervant mais il me faisait penser à moi. Il n’avait pas de cœur, pas en surface du moins. Je savais qu’il avait dû vivre quelque chose de triste et pitoyable… Comme moi. Et oui, j’avais déduis tout cela après une première rencontre mais à l’image de ces mecs homosexuels qui repéraient d’un coup d’œil si un mec était gay ou hétéro, moi, je repérais les hommes et les femmes brisés, perdus, pratiquement morts à l’intérieur. Parce que nous étions du même monde. Bref, ce n’était pas pour ça que je l’appelais mon ami et que je lui tapais la bise à chaque fois que je le croisais, il n’y avait pas écrit Mère Teresa sur mon front. D’ailleurs, ce n’était que la deuxième fois que je le voyais. M’avait-il suivi ? Curieux de voir ce que je faisais de mes dix doigts ? Allait-il m’arrêter ? Je me doutais que non. Pour notre première rencontre, il m’avait attrapé en train de jouer au pickpocket, il m’avait dit d’être plus discret… Je ne savais pas qu’il était flic au départ. C’était quelque chose d’étrange, de rassurant mais aussi de vexant. Comme si mon passe-temps ne méritait pas qu’il s’y intéresse ! J’avais l’impression d’être un looser à côté de lui. Mais ce n’était pas le cas, évidemment. J’étais le meilleur dans ma catégorie et je m’estimais heureux de ne pas l’intéresser outre-mesure… Même si j’avais piqué sa curiosité, manifestement.

-… Si vous saviez ! Mais que me vaut cette visite inattendue, John, c’est bien cela ? Vous aimez vous promener dans ce superbe quartier à une heure aussi tardive ou vous avez senti l’odeur d’un crime abominable ?

Il ne semblait pas décidé à m’arrêter. Tant mieux. J’étais soulagé. Je n’étais pas d’humeur à lui prouver que je n’avais rien fait de mal de toute façon. Je vérifiais brièvement que ma voiture était toujours garée en face. Car j’avais la peur irrationnelle qu’elle disparaisse. Elle était mon bébé. Mais passons, après avoir pu me rincer l’œil sur son design magnifique, je reportai mon attention sur ce bon vieux John. Alors, ça pouvait paraître stupide mais j’avais envie de passer du temps en sa compagnie. J’avais une curiosité malsaine pour ce qu’il lui était arrivé. J’avais envie de trouver quelqu’un d’encore plus pitoyable que moi. Pas la peine de me faire la morale, de me sortir une jolie citation de l’Abbé Pierre, j’avais besoin de savoir que d’autres avaient vécu des trucs pires que moi. Et j’avais l’étrange impression que c’était le cas. C’était censé faire du bien d’en parler, alors autant faire copain/copain. Et puis, il travaillait dans la police, il ferait sans aucun doute, un très bon allié. Et en plus, si j’avais bien tout compris, il pouvait deviner des trucs sur les gens. Un genre de profiler. Cela m’intéressait beaucoup. Je voulais voir ce qu’il pourrait deviner sur moi. Bêtement, je me sentais trop compliqué ou trop intelligent pour qu’il devine quoique ce soit sur moi. Je lui souris avec un air de défi dans les yeux.

-Je suis certain que nous avons des tas de choses absolument passionnantes à nous dire. J’ai par exemple une folle envie de savoir ce que vous faites ici… Mais j’avoue que j’aimerai également tester vos étonnantes capacités de déduction en vous demandant de deviner des trucs sur moi. Comme dans les séries à la télé ! Mais l’endroit est mal choisi, je connais quelqu’un qui risque de déclencher une alarme dans quelques minutes et je ne souhaite pas discuter joyeusement ici quand il viendra me chercher. Pourrions-nous aller… Ailleurs ?

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MessageSujet: Re: Une deuxième rencontre, pour apprendre à mieux se connaître. [PV : John]   Une deuxième rencontre, pour apprendre à mieux se connaître. [PV : John] Icon_minitimeVen 21 Sep - 21:11

Oh ! J'cours tout seul. Je cous et j'me sens toujours tout seul.
Et je regarde ceux qui s'endorment aux fenêtres, j'me dis qu'y en a parmis eux qui m'oublient peut-être. ~


La ville est toujours plus calme la nuit. Regarder par la fenêtre à cette heure tardive était presque apaisant. Une sensation étrange soulevait doucement mon cœur et mon ventre. Mes yeux bruns se perdaient dans le décore nocturne ; je fixais les lumières des immeubles alentours jusqu'à se qu'elles s'éteignent une par une. Certaines restaient allumées tardivement : c'était vendredi. Ceci explique cela. Les gens profitaient de ce moment de la semaine pour se détendre plus longuement le soir. Ils ne se levaient pas le lendemain, ils n'avaient pas le stresse des embouteillages, du réveil qui ne sonne pas, des enfants à amener à l'école. La routine d'une vie ennuyante et banale. Oui, tout est beaucoup plus calme la nuit. Mes yeux restaient inexorablement ouverts sur le monde, contrairement à mon esprit qui se fermait à son approche. Je ne pouvais qu'avoir une suite de pensées logiques, de déductions observatrices et comportementales. Chaque jour je n'échappais pas à cette pathétique comédie humaine. Mais je faisais moi-même parti de ce monde, de cette routine, de ce mouvement qui embrasait la planète entière chaque levé du soleil et qui la ralentissait lors de son couché. Car rien n'était jamais endormi. Il y avait toujours quelqu'un, quelque part, qui ne dormait pas. Des automobilistes, des insomniaques, des fêtards, des veilleurs de nuits dans les hôpitaux ou autres centres surveillés. Et, bien sûr, moi non plus je ne dormais presque jamais. C'est pourquoi je me trouvais là, assis sur une chaise, les bras croisés sur le rebord de la fenêtre de mon appartement, le regard perdu dans les ténèbres. Non. Ce terme était inexacte. Je ne fixais pas les ténèbres car, dans cette grande ville qu'était Washington, des lampadaires brillaient à chaque coin de rue, des fenêtres laissaient passer des halos de lumières bienveillantes, des voitures filaient dans un rapide ronronnement de moteur, balayant la route de leurs phrases allumés.

Et moi, assis sur cette chaise, j'observais sans mots dire. A qui parler, de toute façon, j'étais seul. Me parler à moi-même n'était une chose que je ne faisais que durant mon travail. Doux et bien-aimé travail. Peu de gens pensait comme moi, je le savais. Je ne vivais que pour cela. Les énigmes, les mystères que je rencontrais durant les affaires de polices sur lesquelles j'étais lancé me passionnaient, faisait vibrer en moi les cordes qui me restaient de vie. Cette vie avait certains côtés fascinants, mais elle ne valait pas la peine d'être vécue ou que l'on se batte pour elle. Tel était mon avis, je n'en changerai pas car seuls les imbéciles ne changeaient pas d'avis. Et j'étais un bel imbécile. Je savais beaucoup de choses. Plus que la plupart des êtres humains. Mais les sentiments, le sens de l'humour et d'autres choses ennuyantes de la sorte ne faisaient pas parti de mes connaissances. Je savais me tenir, je savais réagir dans telle ou telle situation. C'était tout, et bien suffisant. Jamais je ne pleurais. Il était rare que je ris aux éclats. Je ne parlais pas longuement aux inconnus, à quoi bon ? On en savait déjà beaucoup en les regardant. Je n'avais pas d'amis, hormis Ethan, et ma famille ne comportait, à mes yeux, que mon frère, Nathanaël. Passons. Mon regard se portait donc sur la vie nocturne, moins mouvementée que dans la journée, mais tellement plus fascinante. J'avais ouvert la fenêtre par laquelle j'observais la partie du monde qui s'offrait à ma vue.

Il pleuvait. Très peu, certes, mais suffisamment pour que je puisse facilement deviner les traits verticaux, fins et presque invisibles, qui tombaient du ciel. Des vers de deux poètes français vinrent heurter mon esprit d'une douce mélodie plaintive. « Quand la pluie étalant ses immenses traînées D'une vaste prison imite le barreaux, Et qu'un peuple muet d'infâmes araignées Vient tendre ses filets au fond de nos cerveaux, // Des cloches tout à coup sautent avec furie Et lancent vers le ciel un affreux hurlement, Ainsi que des esprits errants et sans patrie, Qui se mettent à geindre opiniâtrement. » Ces quelques vers – deux strophes plus exactement – provenaient du poème « Spleen » de l'un de mes auteurs favori de la poésie française : Charles Baudelaire. Celui qui avait traduit dans sa langue les ouvrages d'Edgar Allan Poe pour les faire connaître. Les quelques autres vers qui venaient s'introduire dans mon esprit étaient ceux de Paul Verlaine, autre auteur français très célèbre de son temps et encore de nos jours. Ces vers étaient extraits d'un des poèmes de « Romance sans paroles » intitulé « Il pleure dans mon cœur ». « Ô bruit doux de la pluie Par terre et sur les toits ! Pour un cœur qui s'ennuie, Ô le chant de la pluie ! » … J'étais tout à fait pathétique. Voilà que je me surprenais à citer de la poésie française. Toutefois, beaucoup d'auteurs avaient attiré mon attention, et ce plus d'une fois. Je pouvais, dans cette liste, parler de Charles Baudelaire, Paul Verlaine, Arthur Rimbaud, Victor Hugo, Voltaire, Edgar Allan Poe, Maupassant, Sir Arthur Conan Doyle et, pour citer un écrivain plus ''actuel'', Stephen King. J'étudiais, bien évidemment, des ouvrages scientifique. Mais cela n'était pas réellement de la grande littérature classique. Passons. Je clignais des yeux, n'y pensant plus. La lecture m'empêchait au moins de penser à autre chose, ou de dormir. Je tendis la main à l'extérieur, reçu plusieurs grosses gouttes sur la paume de ma main, puis me reculais, fermais la fenêtre et me levais. Je vivais aux grès de mes envies - même si je m'interdisais beaucoup de chose. Pour une fois, je souhaitais mettre les nez dehors sans que l'on m'y oblige. J'étais persuadé que j'allais trouver quelque chose d'intéressant. Et mon instinct ne me trompais que rarement. N'avais-je pas toujours raison, après tout ?

Je traversais mon appartement d'un pas rapide, trouvant mon chemin avec une facilité étonnante. En effet, avec tout ce qui traînait sur le sol, sur les fauteuils et les chaises, la table basse du salon et la petite table de la cuisine, ainsi que partout ailleurs dans mon lieu d'habitat, n'importe qui n'aurait su où mettre les pieds. Moi j'en avais l'habitude : tout ici était à sa place exacte. Je saisis une légère veste, vérifiais que mes cigarettes, accompagnées d'un briquet, étaient dans l'une de mes poches et sortis sans plus de cérémonie après avoir attrapé mon casque de moto. Je descendis les trois étages qui me séparaient de la rue et montais sur mon superbe engin après avoir mis mon casque et mes gants. Je ne savais pas trop où aller. Je suivais une idée précise, dont j'ignorais le but exact. De toute façon je n'avais que ça à faire. Et tout était mieux que de se morfondre sur la comédie de l'existence ou que d'aller se coucher, certain de rêver de choses désagréables. Tous mes sens étaient en alerte à cette heure-ci, après quelques tasses de cafés. Mon cerveau, ainsi que tout mon corps, était habitué depuis longtemps à un habituel manque de sommeil. Si bien que je n'avais plus besoin de beaucoup d'heures pour être au sommet de mes capacités mentales et physiques. Lorsque je dormais – car cela devait fatalement arrivé – ce n'était que d'un œil. Dès l'adolescence j'avais pris cette habitude de rester en alerte pendant mon sommeil. Sursautant au moindre bruit, au moindre froissement de tissu, à la moindre odeur suspecte. C'était peut-être désagréable mais ça ne me gênait pas, bien au contraire. J'arrêtais ma moto au hasard, sur une place qui m'étais familière. Je ne connaissais pas Washington tout entier mais j'en avais une visualisation très large, forcé de me déplacer régulièrement pour des enquêtes palpitantes. Je mis pied à terre, enlevais mon casque et mes gants. Que faisais-je donc ici ? Je trouverais bien. Je savais que je ne me trompais jamais. Cela faisait longtemps que je n'avais plus eu ce genre de sursaut durant lesquels je suivais mon instinct. Je me dirigeais d'un pas lent vers le bar, en face. Il pleuvait de plus en plus fort mais cela ne me gênait nullement. J'aimais la pluie. Mélancolique pluie, douce musique sur les toits de la ville. Je regardais souvent la pluie tomber du ciel lorsque j'étais dans mon appartement. Je ne m'en lassais pas. Une chose inutile que je faisais. Pourquoi m'y sentais-je obligé ? Nulle réponse à cette question. Je me dirigeais donc vers ce bar à l'enseigne rouge et aux lettres lumineuses, les mains plongées dans les poches de ma veste noire.

La porte s'ouvrit, laissant sortir un homme de taille moyenne, plutôt charmant, riche sans aucun doute possible et... Je vis nettement son visage une fraction de seconde. Cela me suffit pour le reconnaître immédiatement. J'avais une excellente mémoire visuelle, surtout en ce qui concernait les visages. C'était les noms que je ne retenais jamais. Sauf celui-ci. Car cet homme, je l'avais déjà rencontré, fascinante personne. Il s'agissait de Benjamin Anderson, écrivain raté et, je le savais, voleur de bas étages. Mais peut-être plus, je ne savais pas... Mon but n'était pas de l'arrêter. Je me fichais éperdument des voleurs, ce qui m'intéressait passionnément, c'était les crimes. Certes, si l'on me lançait sur une enquête de vol, je m'y joignais avec ardeur. Rien n'était mauvais, certaine choses étaient simplement plus simples que d'autres. Bref. Ma curiosité était piquée à vif. Je savais de source sûre que Benjamin ne vivait pas à Washington, il habitait à Los Angeles et cela faisait déjà bien des mois que je l'avais croisé dans ce bar avec Ethan. Alors que venait-il faire ici à présent ? Je décidais de le suivre. Résolution fort excitante. Peut-être ne ferait-il rien de spécial, mais, je le savais, cet homme n'avait rien d'ordinaire. Quoiqu'il fasse, cela ne risquait pas d'être ennuyeux. Un sourire s'accrocha à mes lèvres. Sourire que je réprimais bien vite : pas d'écart, je devais faire mon boulot. J'adorais faire un travail que je m'étais moi-même confié. Discrètement, naturellement, je le suivis donc. Je compris qu'il allait jusqu'à sa voiture, c'est pourquoi je me dépêchais de démarrer ma moto. Et je le suivis pendant plusieurs kilomètres. La route me sembla longue mais il s'arrêta finalement à une certaine distance d'une grande bâtisse que je connaissais fort bien de vue et de réputation. J'avais sans doute déjà eu à faire dans le coin. Pas de conclusions hâtives. Pourtant, elles se faisaient par centaine dans mon esprit dont l'une inévitable : Benjamin n'était pas un voleur de bas étage.

J'arrêtais ma moto bien plus loin, décidant de faire le chemin inverse à pied, pour n'éveiller aucun soupçon des deux côtés. Il avait cessé de pleuvoir pour l'instant. Le ciel gris et lourd menaçait toujours et voilait les étoiles cachées. Je m'arrêtais devant cette grande bâtisse très certainement bien gardée. Comment Benjamin allait-il entrer là-dedans sans se faire remarquer ? Et même s'il y parvenait, comment réussirait-il à en sortir en un seul morceau ? Deux questions qui laissaient planer le mystère au-dessus de ma tête. Je m'adossais contre l'un des hauts piliers du portail. Je l'attendrais ici, je verrais tout cela de mes propres yeux. Quelle raison poussait un homme à entrer dans une maison d'un riche en pleine nuit ? C'était pourtant évident. A moins que Benjamin ne soit une sorte de Chevalier Noir, à l'effigie de Batman, et qu'il soit entré là-dedans pour sauver une demoiselle en détresse ou d'autres détenus. Mais la vie était loin d'être un roman ou une bande dessinée. Il n'y avait nul justiciers, il n'y avait pas de supers-héros, il n'y avait rien que les stupides humains et c'était tout. Je sortis une cigarette de la poche de ma veste et l'allumais en attendant. Les minutes me semblèrent longues mais à la fois très courtes. Le temps avait une emprise assez étrange sur mon esprit, je dois l'avouer. Quelques fois les minutes passaient à une vitesse formidable mais j'avais l'impression de ne pas avoir avancé d'un pouce, si bien que le temps était d'une lenteur exaspérante. J'en étais à ma troisième cigarette lorsque Benjamin apparut enfin dans mon champ de vision. Je ne dis mot. Il avait réussi. Peut-être, à présent, devrais-je partir ? Mais je n'en avais aucune envie, poussé par le besoin de savoir, de m'intéresser à cet homme. Il était ressorti de cet endroit alors que j'estimais que c'était impossible. Mais il l'avait fait. Avec un – ou plusieurs – trophées de chasse sans aucun doute. Je m'avançais d'un pas, léger et sans bruit. La pluie commençait à tomber du ciel en fin filets d'argent. Je lançais, avec nonchalance, presque ironique, à l'adresse de Benjamin :

« Alors, bonne soirée ?

Il m'avait déjà remarqué et s'avançait vers moi. Je ne pouvais dire si, dans ses traits, il y avait de la surprise ou de la peur. Il semblait tout à fait détendu et prêt à répliquer du tac au tac. C'était un comportement fascinant. N'importe quel homme de ma connaissance aurait pris la fuite à la vue d'une personne qui attendait devant la maison où il venait de dérober quelques petits objets de valeurs. La réponse qu'il me donna arracha un sourire à mes lèvres. Sourire amusé. Il avait de la réparti, j'aimais bien ça. Au moins ne perdait-il pas son temps à se justifier en bégayant comme un demeuré. Il savait lorsqu'il était pris la main dans le sac. C'était le genre de personne à aimer les aventures, n'est-ce pas ? Il n'aurait pu se résoudre à vivre derrière les barreaux d'une prison, j'en étais certain, ivre de liberté qu'il était. J'aurais dû l'arrêter, j'étais flic. Cela aurait été normal, mon travail somme toute. Mais je ne voulais pas le faire, ce n'était nullement mon intention. D'un côté je préférais les meurtres et puis... Tant qu'on ne me lançais pas sur ces vols, je n'avais aucune raison de savoir. Je savais très bien fermer les yeux pour faire semblant de ne pas voir... Ou ne pas voir du tout, dans certains cas... Mais passons. Pour la première fois dans ma vie, je m'intéressais à quelqu'un d'autre que moi-même. Ce Benjamin m'intriguait beaucoup, j'aurais apprécié lui parler. Mais ici, devant cette riche bâtisse, n'était-ce pas un peu risqué ? J'eus l'idée de l'entraîner dans un bar. Ou au poste. J'aurais pu l'arrêter et avoir une discussion privé avec lui sur le lieu de mon travail. Mais cela l'aurait rendu méfiant, l'aurait peut-être affolé l'espace d'une ou deux heures. Et nous n'aurions pas eu une franche discussion, n'est-ce pas ? De plus, on m'aurait posé des questions, demandé un rapport. Certes, je mentais à la perfection, comme si cela faisait parti de mon être, mais je ne voulais pas d'yeux ou d'oreilles indiscrètes. Je n'eus pas besoin de lui proposer une conversation. Il le fit de lui-même, comme si cela était tout à fait naturel, une pensée qui serait venue à n'importe qui. Étions-nous pareille lui et moi ? Je tenais bien à deviner des choses sur lui, c'était l'une de mes spécialités. En échange, il aurait le droit de me poser quelques stupides questions. Stupides ? Je ne pensais pas que ses questions seraient stupides. Je lui fis signe de venir un peu plus loin. Je ne savais pas s'il me suivrait. Je n'étais assuré de rien mais je commençais à cerner la personnalité de cet homme. Il ne proposait pas des choses dans le vide, j'en étais sûr. Pas de ce genre, en tout cas. Par-dessus mon épaule je lançais :

« Suivez-moi donc dans mon appartement. Nous en sommes plus proche que de chez vous en tout cas. Et là-bas, il n'y aura que nous, pas d'oreilles indiscrètes. Ne vous en faites pas, je ne vous amène pas au poste de police. Si ça avait été le cas, vous seriez déjà menotté sur le sol. Ce n'est pas cela qui m'intéresse chez vous. »

Sans plus de cérémonie j'atteignis ma moto et démarrais. Je ne savais pas vraiment s'il allait me suivre. S'il ne le faisait pas, tant pis. J'avais son adresse depuis internet de toute façon. Une visite aurait été aisée, il le savait très certainement. Je regardais dans mon rétroviseur, et vis avec une certain plaisir qu'il me suivait dans sa magnifique voiture. Cela était décidément voyant : c'était un homme riche. Riche grâce à autrui, car même si c'était un écrivain célèbre de par son charme et sa beauté, ses livres étaient médiocres. Peut-être n'était-ce ni mon genre ni mon style, mais je lisais de tout, et savait lorsque quelque chose était mauvais. Même les histoire à l'eau de rose – que j'exécrais particulièrement – avaient un bon style, un genre particulier. Je ne pouvais les qualifier de mauvais, car, après tout, les écrivains avaient un certain talent. Mais ce n'était pas le cas de Benjamin qui racontait les plates aventures de son personnage. Passons. Je devenais méchant. Mais il ne pouvait lire dans mon esprit, fort heureusement. Mais d'ailleurs, je ne me serais nullement gêné pour lui dire cette vérité en face. Je ne voyais pas pourquoi les gens s'obstinaient à ne rien dire et à mentir. Je garais ma moto à la même place que lorsque j'étais partie. Il pleuvait de moins en moins mais toujours cependant. Je jetais un coup d'oeil par-dessus mon épaule. Benjamin était bien là, fidèle à son poste et à ses paroles. J'appréciais ce genre de personne. Il aurait très bien pu en profiter pour se défiler, disparaître. Mais il ne l'avait pas fait. Il n'était pas un lâche, pas comme moi. Moi, j'aurais été du genre à me défiler bien qu'appréciant les aventures et les nouvelles choses. Si j'avais été un criminel, j'aurais été fort redouté, j'en étais certain. Au lieu de cela, je servais la police. Ils pouvaient s'en estimer heureux. Je montais les escaliers jusqu'au troisième étage. L’ascenseur était en panne depuis deux ans, personne ne l'avait jamais réparé. De toute façon je ne prenais pas l'ascenseur, une perte de temps. J'ouvris la porte et entrais dans mon appartement. Je ne me souciais guère de recevoir quelqu'un dans un tel désordre, pour moi c'était normal. Je ne perdais pas mon temps à ranger et c'était dans ce bordel que je retrouvais toutes mes affaires. J'allumais la lumière d'un geste vif de la main.

« Faites comme chez vous, je pense que nous parlerons un moment, n'est-ce pas ? Un café, ou un verre d'eau pour accompagner cela ?»

Je souris en coin. Je l'avais vu prendre un café le jour où nous nous étions rencontrés dans ce bar. Je me rappelais également la légère grimace en voyant Ethan, et moi-même, boire du thé. Je ne lui en proposais donc pas. Sans attendre une réponse quelconque je mis la machine à café en marche dans la cuisine, juste derrière la salle de séjour. Mon appartement était fort simple à décrire : dès la porte d'entrée il n'y avait ni couloir pour accéder au reste, directement c'était la salle de séjour avec deux fauteuils, une tale basse, une immense étagère sur le mur où étaient rangés des livres et où s'entassaient quelques bibelots – cadeaux des nombreux voyages de mon père dans mon enfance et mon adolescence. Nulle séparation entre la salle de séjour et la cuisine qui était comme toutes les cuisines américaines, avec, cependant, un petit espace car je vivais seul je n'avais pas besoin de grandes choses. A côté de la cuisine, il y avait un mur où une porte fermée donnait sur la chambre que je n'occupais jamais. Le mur continuait, formant un angle, et sur le mur de droite, la porte de la salle de bain. C'était ce qu'il me suffisait pour vivre. Célibataire à vie – selon moi – et nullement intéressé par d'autres choses que ce que je faisais actuellement... J'apportais les deux tasses, balayais la table basse d'un revers de ma main libre avant de les poser dessus. Les journaux s'étalèrent sur le sol dans quelques bruits de froissures. Il n'y avait plus rien d'intéressant dans ceux-ci mais je les gardais tout de même. La pile qui se tenait sur la droite relatait plusieurs enquêtes que j'avais résolu. J'en étais fier, mais je ne me vantais jamais.

Je pris place dans le fauteuil en face de Benjamin et le fixais ardemment.

« Je me doutais bien que vous n'étiez pas un voleur de bas étages, riche comme vous l'êtes et si médiocre écrivain. Je me doute que ce n'est pas le premier des vos exploits. N'avez-vous rien d'intéressant à me raconter ? Je suis sûr que si car vous m'intéressais. ~ »
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Benjamin Anderson

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MessageSujet: Re: Une deuxième rencontre, pour apprendre à mieux se connaître. [PV : John]   Une deuxième rencontre, pour apprendre à mieux se connaître. [PV : John] Icon_minitimeSam 22 Sep - 20:41

Pourquoi juge-t-on notre vie par rapport à nos mauvaises actions ?

Peut-être étais-je en train de commettre une énorme erreur ? Bah… Comme à mon habitude, je ne réfléchissais qu’après coup. Il aurait pu m’emmener au poste de police le plus proche, me faire arrêter. Je ne m’en inquiétais pas plus que cela mais bon… C’était justement ça le problème, pourquoi je ne m’inquiétais jamais de rien ? J’étais complètement stupide… Et insouciant. J’avais toujours été stupide. Je le suivis. Non, je n’avais aucune confiance en lui, je n’avais confiance en personne… A part Tony. J’avais parlé, et maintenant j’agissais, sans réfléchir. Au fond, je devais être un garçon très innocent. Un homme louche aurait pu me proposer une sucette si je montais dans sa camionnette, j’aurais accepté sans aucun doute. C’était pitoyable. Il me proposa d’aller chez lui. Splendide. Et oui, c’était beaucoup plus proche que de chez moi. Je n’habitais pas Washington aussi, ça jouait. En y repensant, je ne me souvenais même plus pourquoi j’étais dans cette ville, à l’autre bout des Etats-Unis, tellement loin de Tony et de mon manoir. Je n’étais pas venu pour cambrioler une maison… Ce n’était pas mon genre, j’avais bien assez à faire chez moi. Los-Angeles, l’une des plus grandes villes du monde, était remplie de pigeons prêts à être plumés. J’étais là pour mes bouquins, non ? … Mais comment pouvais-je me poser la question alors que je savais que je n’avais pas la réponse ? J’étais idiot ou quoi ? … Passons. J’étais forcément ici pour affaire. Mes merveilleux et prodigieux livres. Peut-être que ce cher John les avait lus… J’espérais que ce ne soit pas le cas. Il devait penser que je ne valais pas grand-chose sinon. Je m’occuperai de régler cette question dès que nous pourrions parler à têtes reposées. Les livres étaient mon moyen honnête de gagner ma vie. C’était amusant, peu contraignant, j’avais la célébrité, contrairement aux grands PDG. Mais je ne reconnaissais pas être un véritable écrivain. J’étais plus connu pour ma personnalité que pour mes bouquins, j’avais un peu trop de tares… Contrairement à Hugo ou Wilde, je n’avais aucune envie de transmettre la passion de la littérature, de l’art, je n’avais aucune idée révolutionnaire à exprimer, je n’étais donc pas un écrivain… Juste un type, sexy et dérangeant, qui n’avait pas fait d’études et qui se débrouillait pour ne pas avoir à bosser. Et puis, l’argent de mes crimes aidant, je m’étais fait une jolie place au soleil.

Je fus néanmoins beaucoup plus rassuré par la suite. J’avais besoin d’entendre qu’il n’avait pas l’intention de me jeter en prison. De quoi aurais-je eu l’air avec des menottes aux poignets ? Je rejoignis ma somptueuse voiture. Ravi d’avoir attiré l’attention de quelqu’un sur ce que je faisais de mieux. J’avais toujours eu un problème d’égo, je me sentais supérieurement intelligent mais j’avais le besoin inexplicable de l’entendre dire par les gens que je fréquentais. Il fallait qu’on me dise que j’étais intelligent, que j’étais doué, que j’avais du talent, peu importe, je voulais juste qu’on me flatte. Tony le faisait très bien. Il n’y avait qu’à lui que je pouvais confier mes peurs, il n’y avait qu’avec lui que je pouvais être moi-même. Et je lui demandais souvent de me dire que je n’étais pas un raté, que je n’étais pas nul. C’était surement un truc lié à mon enfance encore, enfin bref, je ne faisais pas une thérapie là. Je voulais simplement dire que j’étais très heureux qu’il s’intéresse à moi. Surtout pour ce « passe-temps » qui était connu de très peu de personnes, finalement. De personne d’ailleurs, à part Tony, évidemment, et John maintenant. Je montai dans ma splendide voiture de sport avec l’envie folle de ne plus la quitter… J’avais décidemment, beaucoup de pathologie grave… Je suivis la moto de John jusqu’à son appartement, qui n’était pas très loin, en effet. Il devait me trouver stupide… Suivre un inconnu… Enfin, un homme dont je ne savais que le nom et la profession. Je n’avais rien d’autre à faire… Et l’ennui était l’une de mes hantises. Il m’occuperait, un temps. Je sortis de ma voiture, je montai les escaliers, à sa suite. Je me sentais quelque peu… Dépaysé. L’ascenseur était en panne… Il était rare que je mette les pieds dans un immeuble avec un ascenseur en panne. Ce n’était pas mon… Monde. Pour moi, tout n’était que luxe et richesse. Cela dit, j’avais une sainte horreur des ascenseurs. Monter dans une boîte en métal sans garantie d’en sortir vivant, très peu pour moi. J’entrai. Je ne m’attendais vraiment pas à cela. C’était un homme tellement… Intelligent et brillant et il vivait dans un capharnaüm. Faire comme chez moi serait donc peu évident. Tout était parfaitement rangé chez moi, et il y avait des tableaux, des sculptures, de l’art. Et puis il y avait une chose que je ne trouverai nulle part ailleurs : Tony.

Passons, il ne voulait certainement pas dire « faites comme chez vous » dans ce sens-là. J’avais l’esprit un peu mal tourné. Il me plaisait, en effet, que nous discutions un moment. Cela m’éviterait de dormir et de… Enfin bref. Passer la nuit en compagnie d’un homme tel que John promettait d’être amusant. Il me proposa à boire. Il n’attendit pas ma réponse, allumant ce que je supposais être la machine à café. C’était cela que j’aurais pris. Cet homme était un genre de super-héros ? Il lisait dans les pensées ? C’était tout à fait fascinant. Il ne m’avait même pas proposé de thé. Cette boisson ridicule. Tony aimait bien le thé… Normal, il était anglais après tout. Moi, je détestais cela. Je m’installai dans un fauteuil. John apporta les tasses de café. Il se contenta de pousser ce qui le gênait. Quelque part, je n’étais pas vraiment en mesure de me moquer. Je détestais le rangement, le ménage, la cuisine… Pour parler en macho, tous les trucs de bonne femme. J’exécrais aussi tout ce qui se rapprocher de près ou de loin à de l’altruisme, de la charité –comme par exemple, les gentils prêtres qui offraient l’aumône aux pauvres sans-abris-, la politesse aussi, en gros, tout ce que mes parents m’avaient appris en terme de morale. J’étais un connard, malpoli et fainéant. Mais dans ma vie, j’avais Tony pour compenser tous mes mauvais côtés. Parfois, je n’arrivais même pas à comprendre pourquoi il sortait avec moi. Nous étions tellement différents. Les opposés s’attirent comme on dit. Il aurait sans doute mieux fait de se trouver un mec gentil, à son image, un Sam… Pas moi… Mais je n’allais certainement pas me plaindre de mon nouveau petit ami. Je l’aimais plus que n’importe quoi au monde, je lui souhaitais donc la plus belle des vies… Je doutais qu’elle soit avec moi. Il avait eu la patience de m’attendre, il trouverait celle de me garder auprès de lui. Et puis, je faisais des efforts ! Je n’avais pas couché avec une seule fille depuis que nous étions ensemble, je n’organisais plus de fête ignoble, j’avais arrêté la drogue, j’essayais même d’être gentil, de l’écouter. Aalis était en train de se lasser, nous allions nous séparer dans peu de temps. Tant mieux. Et bientôt, nous pourrions vivre le parfait amour, Tony et moi. Cela ferait la une des journaux et je pensais à mon frère.

Bref, je passais sur les détails du genre « Tony était l’homme que j’attendais depuis toujours, il était sous mon nez et je ne l’avais même pas remarqué. » ou encore « Je l’aimais depuis le départ, mais je ne voulais pas croire que cela puisse être vrai… » ou même « Je n’avais jamais vraiment remarqué sa présence, avec mon éducation difficile, mon passe-temps dangereux, mon envie de désobéir à chaque putain de commandements… Il était pourtant si proche. ». Il ne me manquait plus que le meurtre. Drôle d’idée, penser à cela chez un policier… Comme si j’avais les épaules pour commettre un homicide, sans le faire exprès à la limite, quoique même cela, ce n’était pas mon genre. John s’était assis en face de moi. Sa première remarque m’arracha un sourire. J’étais flatté, c’était agréable. Evidemment, le « si médiocre écrivain » m’étant familier, je ne faisais même plus attention. En général, l’on me disait cela pour deux raisons, la première, était la jalousie, après tout, j’avais réussi et je n’avais pas besoin de me soucier de mon avenir avec mes comptes en banque. Mes comptes en banque étant la seule chose dont je m’occupais sérieusement dans ma vie, avec mes voitures. Il m’était impossible de me faire plumer comme un jeune riche sans expérience, mes talents de comptable étaient très pratiques finalement. La deuxième raison était, parce que c’était la vérité. Quelqu’un ayant une certaine expérience en littérature était obligé de se rendre compte que j’étais mauvais. Je dirais pour ma défense que… Mes livres sont destinés à de jeunes adolescentes en chaleur cherchant un homme mystérieux à aimer. John faisait forcément partie de la deuxième catégorie. Je ne m’en offusquai donc pas. Il me surprit cependant, raconter mes exploits … ? C’était la première fois que l’on me demandait cela… Enfin, Tony faisait bien semblant de s’y intéresser mais ce n’était pas pareil… Non pas qu’il s’en fiche, je savais qu’il s’inquiétait et lui raconter que j’avais failli mourir, tué par une bande de gardes arrogants, ce n’était pas la meilleure chose à faire pour le rassurer. John méritait bien que je lui offre une réponse… Et puis, mes exploits ne manquaient pas, en effet. Je faisais cela depuis bien longtemps maintenant. Je vérifiai brièvement que le bijou volé était toujours dans ma poche avant de reporter mon attention sur le policer. Je lui souris,

-Je suis vraiment flatté de l’intérêt que vous me portez, cela me va droit au cœur. Et effectivement, n’importe qui doté d’un cerveau comprendrait que l’écriture n’est pas mon fort… Heureusement pour moi, ce n’est pas le cas de beaucoup de gens, et je pourrai très bien arrêter mon « passe-temps », ce que je gagne avec ces bouquins serait largement suffisant pour que je vive comme je l’entends pendant quelques décennies. Les hommes sont stupides : Je m’en réjouis.

J’attrapai la tasse de café et en bus quelques gorgées. Je me doutais qu’il pensait comme moi, en ce qui concernait les hommes. Quelqu’un d’intelligent comme lui se sentait forcément au-dessus de la masse. Je ne pensais donc pas le choquer outre-mesure. Et je m’en fichais après tout ! Je disais ce que je pensais… La plupart du temps. Bien. Il ne me manquait plus que le quelque chose d’intéressant à raconter. Je devais bien avoir ça en réserve. En espérant que ça l’intéresserait… Une fois encore, je m’en fichais en fait. Il n’avait qu’à pas demander si jamais il se plaignait de trouver mon histoire ennuyeuse. Je soupirai intérieurement. Oui, puisque à l’extérieur, j’étais très souriant. Surement très faux pour un œil expérimenté mais, toujours très souriant. Même moi je ne savais pas quoi penser de cette habitude. J’étais un homme si heureux ! Je terminai le café et reposai la tasse sur la table basse avant de reposer les yeux sur John.

-Quelque chose d’intéressant à vous raconter… J’ai des milliers d’histoires passionnantes mais si vous avez lu mes livres, il y en a que vous devez déjà connaître. Il se pourrait par exemple que je sois à l’origine de la disparition d’un Dali dans un musée à Los Angeles il y a peu de temps, bien que tout cela ne soit qu’une rumeur. Je préfère évidemment m’attaquer aux résidences privées comme vous avez pu le remarquer ce soir. J’ai beaucoup moins de chance de me faire attraper. Quel meurtrier porterait plainte pour le vol d’un bijou qui au final était lui-même volé ? Ca ne fait pas plaisir à Tony, il trouve cela trop dangereux. Oh et pour information, Tony est mon… Mon… meilleur ami. Passons, je vous parlerai de mes aventures, un jour… Et finalement, pourquoi vous m’avez suivi, par simple curiosité ? Et pourquoi vous ne m’avez pas arrêté ? Je sais que je suis bien moins prestigieux qu’un nouveau Ted Bundy mais, je ne suis pas un vulgaire pickpocket… Enfin si, aussi… Bref… Je vous en suis reconnaissant, mais j’aimerai bien savoir…

Je me surprenais à demander cela. Je devrais m’estimer heureux de ne pas être en taule. Je parcourais l’appartement des yeux. J’avais envie de jouer avec John maintenant. J’allais lui demander un truc stupide. Un truc qui allait me rappeler à quel point j’étais un mec pitoyable. J’aimais me torturer, c’était une sorte d’auto masochisme. Bref. J’avais une question, toute prête, qui ne m’avantagerait certainement pas s’il répondait juste. Mais je doutais que ce soit le cas…

-Cela va peut-être vous paraître étrange mais j’ai bien envie que vous deviniez des choses sur moi. Vous avez compris tout de suite que je prendrais du café, toute à l’heure… Cette fois, j’aimerai bien voir quelque chose qu’un homme lambda ne saurait découvrir comme… Voyons, vous avez l’embarras du choix chez moi, je suis un homme rempli de mystère. Dites-moi par exemple, est-ce que je préfère ma mère ou mon père ? Vous qui êtes bien plus intelligent que la normale, épatez-moi !
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MessageSujet: Re: Une deuxième rencontre, pour apprendre à mieux se connaître. [PV : John]   Une deuxième rencontre, pour apprendre à mieux se connaître. [PV : John] Icon_minitimeDim 24 Fév - 14:07

« Si on a pas peur, on a pas besoin de prier. »
Je portais la tasse de café à mes lèvres. Le liquide était brûlant, me piqua la langue et la gorge. Cependant je ne fis aucune grimace. Je me contentais d'avaler en silence et de reposer le récipient sur la table basse. Toute mon attention était concentrée sur Benjamin. Qu'allait-il donc me dire, sur quoi notre discussion allait-elle porter, comment les choses se dérouleraient-elles ? Je me posais soudain beaucoup de questions... Il se dit très flatté. Je n'en doutais pas. Il s'agissait là d'un homme qui aimait bien qu'on le complimente, n'est-ce pas ? Je ne pus m'empêcher de sourire à ses réflexions sur les autres êtres humains. Oui. Ils étaient stupides, c'était vrai. Ils ne voyaient rien, ne comprenaient rien, suivaient les autres comme de simples moutons hébétés. Je ne pouvais qu'être d'accord avec les propos de Benjamin. Personne ne pouvait se douter de ses petites occupations, il avait une solide couverture. Les criminels étaient loin d'être stupides, en règle général, c'est cela les rendait intéressants à mes yeux. Je n'étais pas profiler. Mon ancien assistant, Ethan, qui avait pris ses côtés et n'étaient jamais revenu en service, l'était. En tout cas, même si je n'étais pas profiler, je cherchais à savoir quels étaient les différents comportements des hommes que je pourchassais. Cela m'aidait dans ma quête, au-delà des preuves matérielles. Certes, j'aimais la logique, les preuves tangibles, mais je savais qu'un portrait psychologique ne pouvait être écarté, cela était trop utile. Je pouvais ainsi repérer les manies de la personnes, ses habitudes, ses tics, ses peurs, les endroits où elle serait susceptible de se cacher... Et tant d'autres choses. Il en serait de même pour Benjamin, cela ne faisait aucun doute. Je pouvais déjà remarquer beaucoup de choses. Il n'aimait pas les montres, et pourtant il en portait une. Pourquoi je pensais... non je savais qu'il ne les aimait pas ? Eh bien c'était assez simple... En règle général, les personnes à montre aimaient beaucoup les mettre en valeur, les regardait régulièrement. Soit elles étaient obsédées par le temps – stressées dès qu'il n'y avait pas d'horloge dans la pièce – soit, tout simplement, elle étaient fier de leur objet. Celle de Benjamin était sans aucun doute de valeur, peut-être même avait-elle été volée, mais il semblait s'en ficher. Il ne remarquait presque pas sa présence sur son poignet, pas un seul coup d’œil pour s'informer de l'heure, pas un seul geste pour la toucher du bout des doigts... L'apparence doit avoir une certaine importance... L'un de mes jeux favoris était celui-là : l'analyse des gens. Seul mon frère, Nathanaël, savait lorsque je pratiquais cette méthode et me lançait alors des regards noirs pour que j'arrête immédiatement. Chose que je faisais. Je n'aimais pas les regards noirs de mon frère...

Ce qu'avait volé Benjamin était sans aucun doute dans sa poche. Il venait de vérifier brièvement s'il s'y trouvait toujours. Je retins un sourire, car dans de telles circonstances... Mais ce n'était pas comme lors d'un interrogatoire... J'attendis, sans porter la tasse de café encore brûlante à mes lèvres, peu désireux de me faire mal à nouveau. Même si je supportais assez bien la douleur, je n'étais pas masochiste et je détestais avoir mal. C'était une sensation vraiment désagréable. Mais je ne faisais pas l'enfant lorsque cela m'arrivait et m'efforçais de garder un grand contrôle de moi-même. Et cela m'arrivait parfois durant mes enquêtes. Benjamin me sourit. Que de politesses... Il n'avait pas à faire cela. Pas à moi, en tout cas. Mais je m'abstins de tout commentaire. C'était une habitude qu'il avait prise, sans doute, de sourire alors que, de toute évidence, ça n'allait pas tant que ça. Qu'importait... Je n'étais pas psychologue. Je passais une main dans mes cheveux noirs et arrêtais tout autre geste. Il pourrait peut-être les interpréter, lui aussi... Je le jugeais d'un rapide coup d’œil. Non. Il ne le ferait pas. Il était sans nul doute observateur, mais pas autant que moi, et ne s'amusait pas à analyser les personnes avec qui il discutait en se basant sur leurs tics et leur gestuelle. Ca, c'était mon jeu à moi. J'attendais toujours qu'il daigne me raconter quelque chose d'intéressant. Il ne devait pas manquer d'histoires dans son domaine. N'avait-il pas failli, une fois, se faire arrêter par la police ? Car même si mes collègues étaient stupides, ils devaient être sur sa piste... Même s'ils étaient sans doute loin de se douter qu'il s'agissait de Benjamin Anderson le... célèbre écrivain. Même si sa littérature était d'une bassesse affligeante. J'avais sa collection de livre dans mes étagères, quelque part de ce fouillis. Si j'avais pris le temps de réfléchir à leur emplacement, je les aurais trouvé aussi facilement que dans une bibliothèque municipale où les ouvrages étaient classés par noms d'auteurs, dates, etc... mais je ne pensais pas à cela. Mon regard se mit à briller lorsqu'il me parla du Dali du musée de Los Angles. Je ne m'intéressais pas du tout aux ouevres d'arts, bien que mon frère soit peintre, alors je n'étais pas au courant de leurs disparitions. Toutefois je savais que, pour être dans un musées, ces objets étaient de grandes valeurs. Et si beaucoup de ses histoires passionnantes étaient relatées dans ses livres, j'allais m'empresser de les relire. Cette fois, la lecture serait bien plus intéressante, sachant que là étaient les méthodes d'un professionnel. Tony ? Qui était Tony ? Mes yeux s'arrêtèrent de briller pendant une minute, ces petites relations ne m'intéressaient pas, bon sang... mais mes yeux reprirent rapidement de leur éclat. Il buta sur l'adjectif pour désigner ce dénommé Tony. Sûrement un diminutif d'Anthony, d'ailleurs. C'était amusant de voir l'hésitation dans ses paroles lorsqu'il en avait parlé. J'eus un petit rire silencieux, comme lorsque j'étais très satisfait de moi-même.

Benjamin ne manquait pas d'intelligence... Il était vrai qu'un voleur n'allait pas porter plainte parce qu'on l'avait volé. C'était une moyen de sûreté en quelque sorte, du moins pour se protéger de la police... Mais il devait se faire pas mal d'ennemis du côté des criminels... La question resta quelques instant en suspend... Oui, c'est vrai... Pourquoi l'avais-je suivi ? La curiosité est un vilain défaut, mon garçon. Mais c'était aussi la plus noble des qualités à mes yeux. Car sans curiosité, point de savoir. Et aucun mystère à vouloir résoudre ! J'étais un homme curieux et désireux d'apprendre, jamais assez savant. C'était pourquoi j'avais souhaité ne sauter aucune classe durant ma scolarité. De toute façon, ma très chère mère s'y serait opposée, elle qui était sans cesse jalouse de tout ce que j'accomplissais. Aussi bien dans ma vie que… Enfin passons. Le moment était très mal choisi pour se replonger dans des souvenirs d'enfance ou d'adolescence. Je posais un doigt sur mes lèvres, comme je le faisais toujours lorsque je réfléchissais très vite. Je lavais suivi par curiosité. Parce qu'il me fascinait. J'avais l'impression d'avoir trouvé une perle rare parmi d'autres, en toc. Benjamin était cette petite pierre brillante qui faisait luire la flamme de mon regard. La flamme de ma passion pour les énigmes et les mystères. J'avais en face de moi... Un livre fermé. Ouvert, en apparence. Les premières pages étaient limpides et très claires à mes yeux. Mais le reste était indéchiffrable. Écrit en une langue que je comptais bien apprendre. Et pour cela, je mettrais beaucoup de choses en œuvre. C'était une nouvelle motivation qui se dressait dans ma vie, une motivation autre que mes enquêtes habituelles. C'était assez excitant, d'un certain côté. Je souris en coin. L'une de mes spécialité ce petit sourire. Comme si je ne savais pas sourire pleinement, comme le faisait Benjamin, même si cela sonnait faux. Les autres, ces idiots, devaient penser que Benjamin était quelqu'un de très heureux. Je bus une gorgée de mon café qui avait eu le temps de refroidir un peu depuis le début de la conversation. Il avait besoin de savoir... Pourquoi. Un mot très intéressant. Je cherchais toujours à savoir pourquoi moi aussi. Je le comprenais donc parfaitement et lui fournirais une réponse plus ou moins satisfaisante. Je n'allais pas trop flatter son ego, cet homme était trop sensible aux compliments. Lui en faire trop pourrait s'avérer... Nocif, peut-être ? Nouveau sourire en coin. Je bus encore une gorgée, m'apprêtant à formuler ma réponse.

Mais avant que je puisse prononcer un mot, il me devança et posa d'autres questions. Ce genre de personnes m'agaçait au plus haut point. Ne pouvait-il pas attendre que je réponde d'abord à sa première question avant d'en formuler d'autre ? Je fronçais légèrement les sourcils mais me tus. Ce n'étais pas comme si je n'en avais pas l'habitude. Au travail, c'était la même chanson, de la part de tout le monde qui plus est. Mon chef, qui s'étonnait toujours de me voir réussir alors qu'il savait que mon intelligence était de loin supérieur à tout ces idiots de policier, et mes collègues de la section technique et scientifique. Surtout les chercheu sceptiques de me méthodes... Et ceux qui faisaient partis de mes admirateurs également. Parce que j'avais un... fan-clu si l'on puis dire. Souvent de jeunes nouveaux, ou de jeunes nouvelles, qui trouvaient que j'étais... extraordinaire. Et je l'était. Mais était-ce bien nécessaire de se comporter comme des enfants qui n'avaient jamais vu... Eh bien quelqu'un qui avait un peu de jugeote ? Passons. Ce que me demandait Benjamin n'était pas sans intérêt et me fit très vite oublier mon agacement. Il me proposait de deviner des choses sur lui, comme s'il voulait mettre mes capacités de déduction à l'épreuve. Mes yeux brillèrent. Tout ce dont je rêvais depuis toujours : qu'on me le propose et non que je le fasse sans invitation. Je souris en coin. Je n'avais pas eu tord de sortir cette nuit ! Je frottais mes mains l'une contre l'autre. Mais sa deuxième question me surpris quelque peu. Qui de sa mère et de son père préférait-il ? Mais quelle question dénuée d'intérêt... Très léger tic à l'oeil droit à l'appellation du père. Fine exaspération en parlant de la mère, petite rictus involontaire et léger élèvement des pupilles vers le ciel. Conclusion : la père est préféré à la mère. Le déclic c'était fait automatiquement. Cela dit, je ne me basais pas seulement sur sa gestuelle. A dire vrai... J'étais persuadé qu'il préférait son père parce que...

« Pourquoi vous ais-je suivi ? Ma foi... C'est simple : la curiosité. Lors de notre première rencontre vous m'avez assez intéressé et je vous ai vu sortir de ce bar... Alors je vous ai tout simplement suivi. Moi aussi je voulais savoir pourquoi. Pourquoi vous faites cela, par exemple ? Cela vous procure une satisfaction ? »

… Parce qu'en fait je préférai largement mon père, moi aussi. Répugnant. Mon cœur s'emballa un peu et je bus une dernière gorgée de café, finissant ma tasse. Je me basais sur mes propres ressentis pour ce coup-là. Je n'avais jamais expérimenté cela encore... Normalement je me basais sur des faits... Et un peu d’imagination pour visualiser des suites d'événements. Je plongeais mes yeux dans ceux de Benjamin, sans sourire toutefois. Mais j'étais sûr que j'allais donner une réponse exacte.

« Vous préférez votre père. Je pourrais vous donner quelques raisons de penser cela, comme le léger rictus que vous avez eu en prononçant le mot « mère ». Vos yeux ont d'ailleurs entamer une montée au ciel, comme toute personne exaspéré dans une situation. Et c'est évident... Les mères ne font jamais rien. »

Les derniers mots m'avaient échappés, sans que je réfléchisse vraiment avant de les prononcer. Ils avaient été murmurés mais je ne doutais pas que Benjamin les ai entendus. Je me mordis très légèrement les lèvres. Pourquoi avais-je parlé de cela ? Cela allait amorcer une succession de questions pénibles et... Mais je savais exactement comment détourner l'attention. Ca n'allait pas forcément être très gentil de ma part, cela dit. Mais je n'étais pas là pour être gentil... Et Benjamin m'avait dit de l'épater, n'est-ce pas ? Je le prenais donc aux mots !

« Mais j'ai toutefois remarqué un tic très léger à votre œil droit lorsque vous avez parlé de votre père. J'en déduis donc que vous non plus vous ne l'appréciez pas beaucoup. Pourquoi... ? Hum... Je dirais qu'il vous a très souvent rabaissé. Car votre apparence aux yeux des autres vous obsèdent et vous semblez aimer contrôler votre vie. D'où ce besoin d'être riche, d'être aimé d'apparence et de personnalité... Je suis curieux de savoir pourquoi vous m'avez demandé cela tout en sachant qu'il y avait 50 % de risques que je tombe sur la bonne réponse. Sans prendre en compte mon intelligence plus élevée que la moyenne, ce qui nous amène à un total de 75 % de tomber sur la bonne réponse... De mon point de vue, j'avais 100 % de chances de trouver. Vous espériez sans doute que je me trompe, cela ne nous aurait pas amené à continuer sur le sujet. Les parents doivent être quelque chose de délicat pour vous, mais qu'importe puisque vous êtes quelqu'un qui aimez le risque. Sinon vous ne ressentirai pas un besoin de voler.Car voler vous donne l'impression de vous sentir vivant, il vous faut de l'adrénaline. Pour conclure, vous êtes un enfant battu. CQFD. »

Je ne pensais pas aller si loin dans ma démonstration. Je n'étais pas sûr de savoir comment j'en étais arrivé à la conclusion que Benjamin avait été un enfant battu. Je n'en avais aucun preuve et il allait sûrement démentir. Dans ce cas là, j'avais 60 % de chance de m'être trompé. Je m'étais basé sur le fait qu'il c'était souvent fait rabaissé par son père. Dans ce cas-là, c'était de la violence verbale. Mais d'un certain côté, il détestait plus sa mère que son paternel. On n'en veut pas autant à sa mère si cette dernière ne fait qu'écouter sans rien dire les paroles de son mari qui rabaisse son fils. Quelque chose de grave avait dû se passer pour que Benjamin en veuille plus à sa mère qu'à son père. John n'avait ait qu'émettre des hypothèses à partir de là, car dans son esprit, soit Benjamin avait été battu dans son enfance soit il avait été... Allez dis-le ! Violé. J'avalais difficilement ma salive et me levais pour faire deux autres tasses de café. J'espérais tout de même qu'il n'allait pas s'en aller, j'aimais bien discuter avec lui. Même si cela impliquait qu'il faille parler de parents... Et de toutes ces choses... Assez désagréables. Je revins avec les deux tasses dans le salon et les posais sur la table basse avant de me laisser tomber dans le fauteuil, mon index posé sur mes lèvres. Mes yeux se perdirent un instant dans le vague, posés sur l'ancienne cheminée désormais hors-service. Je me relevais finalement et fouillais quelques secondes dans mes piles de livres avant de tirer les quelques exemplaires que j'avais de ceux de Benjamin. Je les déposais sur la table basse, à côtés des tasses.

« Sachez que je relirais vos ouvrages tout à l'heure afin de suivre vos aventures. Même si le style est inexistant, je suppose que, maintenant que je sais que tout n'est pas fictif, ces livres se montreront peut-être instructif et un tantinet intéressant... Au fait, vous me dites pourquoi vous le faite ou j'avais raison dans mon précédent raisonnement ? Demandez-moi autre chose, si vous voulez ! N'importe quoi, je peux répondre, j'en suis certain.»

Mes yeux brillaient à nouveau. J'avais trouvé un partenaire idéal pour ce jeu de devinettes. Je ne pensais pas avoir pu le secouer avec ma déduction. Je passais tout simplement à autre chose. Je tournais l'une de ses pages que j'avais déchiffré. Mais j'étais loin du compte. Benjamin était un très gros livre. Peut-être même y avait-ils plusieurs tomes...
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Benjamin Anderson

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Une deuxième rencontre, pour apprendre à mieux se connaître. [PV : John] Empty
MessageSujet: Re: Une deuxième rencontre, pour apprendre à mieux se connaître. [PV : John]   Une deuxième rencontre, pour apprendre à mieux se connaître. [PV : John] Icon_minitimeSam 2 Mar - 23:56

Tout seul, le soir, dans le salon, ton père marmonne ses illusions. Il se fait croire qu'il a raison, qu'il n'a pas vu les bleus sur ton front. Pourtant il a si mal ! Pourquoi est-ce si normal, de tant vouloir t'aimer, sans cesse te faire pleurer ?!


J’étais bêtement flatté par les paroles de John. L’intéresser était évidemment tout ce que je voulais, et tout ce que j’avais toujours voulu : que le monde s’intéresse à moi. Je pensais en avoir besoin… De reconnaissance. Mais au fond, je n’attendais celle que d’une seule personne, et c’était la seule personne dont je ne l’obtiendrais jamais. Courir après des mirages était l’un de mes passe-temps favoris. De toute façon, il n’y avait plus aucun doute, j’étais un masochiste plein d’illusions ! Mon père adorait ne reconnaîtrait jamais ma valeur, pourtant je n’étais pas un moins que rien. Je savais faire tellement de choses ! Tout ça dans l’espoir qu’un jour mon père me dise « T’as du talent, gamin. ». Par exemple, j’étais un coureur de jupons invétéré simplement pour lui prouver que je n’étais pas une tapette impuissante. Il ne m’avait jamais dit cela en ces termes mais … C’était l’idée. Il ne m’avait jamais offert la moindre reconnaissance, pour lui j’étais, un moins que rien impuissant. Et je faisais tout pour lui prouver le contraire inconsciemment au début, parce que je ne cessais de me faire croire qu’il ne comptait pas à mes yeux, que je le haïssais. Mais je m’étais construit sur cette violence, sur ce mode de fonctionnement, et maintenant, je ne pouvais plus le renier. La haine et l’amour que j’avais pour mon père avaient fait de moi l’homme que j’étais, les abandonner n’était tout simplement pas possible. Pourquoi ? … Pourquoi… C’était une excellente question. Evidemment que cela provoquait une satisfaction. Mais bien plus que ce que John pouvait imaginer. J’aimais prendre aux riches, je ne donnais pas aux pauvres, certes, mais j’avais l’impression d’être Robin des bois, Arsène Lupin, John Dillinger. De plus, j’avais un talent, quelque chose que les autres ne pouvaient pas faire. C’était ma particularité à moi. Et enfin… C’était une façon merveilleuse de me rebeller contre Dieu, contre mon père… J’avais commencé à faire cela très jeune, dans les magasins ou à l’église lorsque j’étais enfant de chœur. C’était mon challenge, je faisais quelque chose de mal sans que mon père ne s’en aperçoive et c’était le meilleur sentiment au monde. Parce que je gagnais. Donc oui, voler m’apportait une énorme satisfaction, une sensation absolument irremplaçable. Mais cela, à part moi, personne ne pouvait le comprendre. J’en avais besoin, c’était viscéral. Arrêter de voler serait comme renier ce que j’étais. Fort heureusement, personne ne me demandait de faire cela ! … Voilà pourquoi je volais. Et pourquoi j’étais le meilleur : Je le faisais avec le cœur. Cette pensée me fit sourire. On croirait entendre une maman « J’ai préparé cette tarte aux pommes avec amour ! » alors que je n’avais pas connu ce genre de maman. J’avais sans doute vu beaucoup trop de film. J’attrapai l’une de mes cigarettes et l’allumai d’un geste machinal. Je fumais depuis toujours, c’était devenu comme une mauvaise habitude et étonnamment, je n’avais jamais eu le moindre problème de santé, cela dit, j’étais encore jeune…

… Evidemment que je préférais mon père. Mon père était l’être le plus important dans ma vie, sans doute au même niveau que Tony… Je me demandais si cela n’avait pas été une erreur de lui poser cette question. Je ne voulais pas que nous parlions de cela. J’avais été trop prétentieux. Et maintenant, je devais payer le prix. Je n’étais pas plus intelligent que tout le monde et certainement pas plus intelligent que John. Cela dit… Son analyse restait tout à fait raisonnable. Je n’éprouvais que du mépris pour la femme qui me servait de mère, c’était donc normal qu’il le voit dans mon langage corporel. Pour moi, elle était celle qui n’avait jamais rien fait. Quoique je dise, quoique je fasse, elle avait toujours posé sur moi son regard méprisant et distant. Elle ne m’avait jamais aimé. Et je ne l’avais jamais aimé. Elle était celle qui m’ordonnait de faire la vaisselle ou de nettoyer ce que mon père laissait en désordre. Elle ne m’avait jamais rien dit, jamais pris dans ses bras. Pour elle, je n’étais rien, j’étais réellement rien. Si elle m’avait pris dans ses bras une seule fois, si elle m’avait expliqué pourquoi elle ne pouvait pas m’aider, j’étais certain qu’elle aurait eu sa place dans mon cœur. Mais cela n’avait pas été le cas, elle me détestait comme elle détestait Ian et son mari. Nous n’étions pas la famille qu’elle souhaitait et elle nous le rendait bien. Elle ne s’intéressait pas du tout à moi contrairement à mon père et c’était aussi pour cette raison que je la détestais. Elle n’avait pas le droit de ne pas me voir ! Pourtant, je n’abandonnais pas non plus espoir qu’elle me confie un jour un secret, peut-être lorsque mon père serait mort. Pour le moment, elle était muette comme une tombe. Je me demandais même comment mon père avait fait pour épouser cette guenon ! John avait bien raison, les mères ne faisaient jamais rien… Mais pourquoi avait-il dit cela ? Ma mère n’avait jamais rien fait mais il ne pouvait pas être au courant rien qu’en me regardant. Je savais qu’il avait lui aussi quelque chose à cacher, alors était-ce la même chose que moi ? Il avait lui aussi connu la joie d’être haï par son paternel et ignoré par sa mère ? Je n’étais pas certain d’avoir envie de poser cette question. J’en avais déjà trop fait. Et je ne voulais pas l’entendre raconter une histoire comme la mienne. J’avais beaucoup plus d’empathie pour les gens qui pouvaient me comprendre, mais ce genre d’histoire faisait remonter des souvenirs douloureux… Même si j’étais le fautif puisque j’avais engagé la conversation là-dessus, je n’étais pas réellement prêt à en parler… Je l’avais dit à Tony mais … Je n’étais pas entré dans les détails. Mais qu’est-ce que j’allais m’imaginer ? Nous ne nous étions vus qu’une seule fois John et moi, nous n’allions certainement pas nous mettre à déblatérer sur nos vis comme cela. Il avait eu ses problèmes, j’avais eu les miens… J’avais simplement voulu jouer un peu voilà tout. Maintenant c’était terminé…

Ou pas. Il n’avait pas l’air de vouloir s’arrêter. Avait-il peur lui aussi que je pose tout un tas de questions dérangeantes sur le « les mères ne font jamais rien » qu’il avait laissé échapper ? Encore une fois, je ne devais m’en prendre qu’à moi-même, j’avais été stupide. J’avais demandé la seule chose qui me mettait profondément mal-à-l’aise. Il ne pouvait pas savoir que je ne comptais pas aller plus loin… Enfin, cela me paraissait tout à fait compromis maintenant. J’allais être obligé d’aller plus loin. Quelque part, j’avais su qu’il devinerait tout rien qu’en me regardant. C’était vexant parce que moi, je ne pouvais évidemment pas le faire… Rabaissé, oui c’était certain… Me blesser avait été l’un de ses passe-temps favoris. Mais mon apparence ne m’obsédait pas… Enfin pas trop… Enfin juste un petit peu… Bon d’accord, j’étais légèrement obsédé. J’avais besoin de plaire, de montrer aussi. A quel point j’avais réussi. Tous les matins, je choisissais des vêtements hors de prix, ainsi qu’une montre hors de prix. J’aurais sans aucun doute pu être mannequin, j’étais toujours à la mode, chic et décontracté à la fois. Sans me vanter, j’avais un super look. Il fallait que je sois parfait pour sortir, que je sois attirant, pas simplement pour les filles… J’aimais être admiré, j’étais quelqu’un. Alors oui, j’avais besoin de reconnaissance. Je devais réussir mais je devais le montrer, le prouver à celui qui n’avait jamais cru en moi. Et j’espérais au fond de mon cœur qu’il avait toujours fait cela dans le but de me pousser à devenir l’homme que j’étais aujourd’hui… Mais j’en doutais. J’affichais un sourire plus ou moins vrai sur mon visage. Moi aussi j’étais curieux de savoir pourquoi j’avais pris ce risque. C’était ridicule. Et c’était vrai, j’espérais qu’il se trompe, nous aurions discuté de choses banales devant un café. J’aurais fumé une cigarette, puis je serais parti et nous ne nous serions jamais revus. Mais cet idiot avait décidé de se la jouer plus intelligent que tout le monde et il avait trouvé la bonne réponse. Comme cela, nous allions pouvoir rebondir sur ma vie misérable. C’était merveilleux. Me prenait-il pour un idiot ? C’était sa façon à lui de détourner la conversation de son lapsus très révélateur finalement, puisqu’il s’avérait être véridique pour lui…. CQFD mon cul. Comment avait-il pu en venir à cette conclusion aussi vite ? … Je ne paraissais pas stressé, au fond je m’y attendais, mais me dire cela aussi … Froidement… Lorsque les gens disaient cela, il y avait toujours beaucoup d’empathie, puis des mots tendres avant et après… Là, rien. J’avais compris que John n’était pas le genre d’homme à se montrer compatissant mais il aurait pu faire le minimum syndical… Avoir une petite hésitation m’aurait suffi ! Maintenant… Je n’allais pas nier, puisque c’était la vérité… J’étais un excellent menteur mais… Je ne voulais pas lui mentir à lui, je n’en ressentais pas le besoin et c’était d’autant plus difficile. La vérité n’avait pas envie de sortir de ma bouche, pas encore.

Savoir qu’il avait mes livres me fit un instant oublier ce qu’il avait dit. Tout le monde avait lu mes livres. Cependant, même en sachant que mon style laissait à désirer, l’entendre le dire, c’était… Vexant. Mais je me vexais souvent pour rien, ou pour pas grand-chose. Une remarque de travers, une critique même si elle était pertinente, pouvait m’énerver au plus haut point. Je voulais que l’on me dise enfin que j’avais des qualités. J’en avais assez des conseils et des critiques pour m’améliorer. J’avais aussi des bons côtés, j’en étais certain et trop peu de gens me le faisaient remarquer… Peut-être que je n’en valais pas la peine finalement ? Enfin… Je n’étais pas là pour me plaindre. Il avait raison, tout cela allait lui paraître encore plus intéressant maintenant. Je racontais tout dans les détails. Je changeais simplement l’œuvre d’art et rajoutais une histoire de détective. J’avais toujours apprécié l’écriture, même si je n’étais pas très doué –je faisais surtout peu d’effort-, cette idée m’était donc venue naturellement. Je préférais largement écrire que me retrouver assis derrière un bureau à gérer une société toute la journée. Je n’étais pas fait pour un job normal. Ecrivain, cela me plaisait beaucoup plus… Et je comptais bien m’y mettre réellement un jour pour que mes livres soient de meilleure qualité ! …. John était tout à fait mignon, lui demander n’importe quoi, comme si j’en avais envie maintenant que je savais qu’il pouvait répondre ! C’était ma vie… C’était… Privé… Mais surtout, c’était compliqué. Il avait le droit de trouver mais il n’avait pas à me demander de lui expliquer. En fait, je… Je devais commencer par quelque chose qui me mettait plus à l’aise. Comme par exemple, les vols, car c’était cela l’important dans ma vie dorénavant, pas mon père et ce qu’il m’avait fait subir. Je fumais ma cigarette tout en jouant avec mes bijoux dans ma poche. Je ne voulais pas avoir l’air d’être déstabilisé par ce qu’il m’avait annoncé. J’étais sur de moi et fier comme à mon habitude et même s’il n’y avait aucune raison de l’être. Je lui souris.

« Une satisfaction aussi grande que lorsque Sherlock Holmes parvient à résoudre les énigmes du professeur Moriarty. Et je suis certain que vous comprenez mieux que personne la comparaison. Mais ce serait trop long à expliquer. Pour moi c’est la liberté, l’aventure, le danger. C’est ce qui donne du sens à ma vie et je crois bien que je ne pourrais jamais m’arrêter. J’ai l’impression de faire cela depuis toujours et d’en avoir toujours envie. La dernière fois que nous nous sommes vus, vous en avez eu un aperçu. J’ai rarement les mains dans mes poches. Il faut simplement savoir que je ne fais plus cela pour l’argent, j’apprécie les belles choses et je ne peux pas m’en empêcher, c’est pour cela que je le fais. C’est ma drogue. »

Bon, maintenant, il s’agissait de passer aux choses déplaisantes. Je n’étais pas le genre de mec à faire cela mais… Si le sujet était trop centré sur ma petite personne, je pouvais toujours rebondir sur sa phrase étrange… En vérité, j’étais tout à fait le genre de mec à faire cela. Même si d’habitude, j’aimais bien que l’on parle de moi… Ici, je trouvais cela bien moins intéressant. Parler de mes livres, de mes exploits au lit, de ma dernière amende pour excès de vitesse, voilà qui ne me dérangeait pas. Mon père était tabou dans mon vocabulaire. Alors autant se focaliser sur les problèmes personnels de quelqu’un d’autre ! C’était toujours plus facile ! Et puis, même sans avoir fait un doctorat en psychologie, je pouvais savoir que John avait vécu quelque chose de pas normal, moi je m’étais créé une fausse personnalité pour surmonter toute cette histoire, des faux sourires, des faux amis, une fausse vie pleine de joie. Lui, il n’avait pas d’amis, pas de petite amie, ni de petit ami d’ailleurs, rien qu’un boulot. Une curiosité malsaine pour les meurtres et les enquêtes. J’étais certain qu’il tentait de penser à autre chose en permanence. J’avais l’impression d’être aux enfants battus anonymes. « Bonjour, j’m’appelle Ben, ça fait 10 jours que j’accepte pleinement d’avoir été un enfant battu. » « Bravo Ben ! » … C’était n’importe quoi ! Pourquoi fallait-il que j’aie ce genre d’images dans la tête ? J’écrasais ma cigarette dans un cendrier en regardant mes livres. Le héros de mes romans n’avait jamais eu d’enfance… Enfin si évidemment, comme tous les enfants. Simplement, je ne l’avais jamais raconté. Et c’était pour une bonne raison, je ne pouvais pas en parler… Et puis, j’aurais perdu bien trop de lecteurs avec ce genre de bêtise. La violence familiale n’est pas ce qui favorise l’achat d’un livre… Bref. Pour répondre à John…

« Vous avez raison. Je préfère mon père. Et je ne vais pas vous mentir… Il m’a rabaissé autant qu’il m’a battu. Je lui souris faussement comme je savais si bien le faire. Je pensais que vous ne trouveriez pas, même moi en vous posant la question, je n’étais pas certain de la réponse. J’avais sans doute besoin de prendre des risques comme vous l’avez dit. C’était pour m’amuser. Mais je ne suis pas certain de vouloir aller plus loin… »

Je réfléchissais quelques secondes. Peut-être qu’au fond, j’avais posé cette question dans l’espoir qu’il trouve la réponse pour enfin pouvoir me libérer de ce poids. Pour ne plus avoir à cacher qui j’étais réellement. Et peut-être que je l’avais fait avec John parce que je savais qu’il pouvait me comprendre. Mais qu’avait-il à deviner sur moi ? Il avait résumé l’histoire de ma vie en cinq mots. J’étais un enfant battu. Il n’y avait rien à rajouter. Mon corps était couvert de cicatrices, je n’avais jamais subi de graves blessures, je n’étais jamais allé à l’hôpital. Et pourtant, j’avais l’impression de voir encore une trace pour chaque marque qu’il avait faite sur mon corps. Comme si quelqu’un s’était amusé à me taillader plus d’une centaine de fois… Oh, mais c’était exactement ce qu’il s’était passé. Finalement, j’avais peut-être envie d’en parler…

« Je vole pour me sentir vivant parce que j’ai été mort à l’intérieur bien trop longtemps et je pense que vous comprenez cela. Mon père était un homme violent, stricte et assez porté sur la religion –notons l’utilisation du passé dans cette phrase pour deux raisons : il ne l’est plus avec Ben et nous savons que Ben ne pense qu’à lui, et pour Ben, il n’est plus son père-, et j’ai un énorme défaut, mais je crois que vous l’avez deviné, c’est que je suis très désobéissant. Nous étions donc en désaccord constamment et c’était plus douloureux pour moi. Mais puisque vous voulez jouer aux devinettes… Dites-moi combien j'ai de frères et soeurs, et qu'est-ce que vous pouvez me dire sur eux ? Et pourquoi je vole ? Je vous l’ai déjà dit mais il y a d’autres raisons dont l’une est beaucoup plus stupide. –Tu sais, enfreindre les 10 commandements !-.

…Mais je ne voulais pas être le seul à parler, et même s’il ne voulait pas, j’étais décidé à le lancer sur le sujet. Lui faire deviner des choses sur moi était bien plus simple que les dire moi-même, mais bien plus long aussi et plus frustrant pour moi de ne rien savoir sur lui en échange ! Je n’avais donc plus qu’à rebondir que la phrase idiote qu’il avait laissée échapper. Critiquer les mères avait toujours été quelque chose de relativement simple pour moi. Car s’il y avait bien une chose sur laquelle je n’avais jamais compté, c’était l’amour d’une mère.

« Et les mères ne font jamais rien, je suis bien d’accord avec vous. Ma mère n’a toujours été qu’une idiote. Elle ne m’adressait jamais la parole, si ce n’était pour m’ordonner quelque chose et n’empêchait jamais mon père de me battre, comme si tout cela lui était totalement égal. D’ailleurs, tant qu’on y est, amusez-vous à chercher avec quoi il me battait. C’est le défi bonus aujourd’hui ! Je lui fis un sourire, les vannes, les trucs débiles, ça je savais faire… Surtout lorsque le sujet était aussi sérieux. Je devais détendre l’atmosphère. Mais maintenant, j’aimerai savoir une chose, pourquoi vous avez dit cela ? En fait, j’ai très bien compris pourquoi vous l’aviez dit, je suppose que vous aussi, vous avez été battu ou quelque chose comme ça ? Je ne vais pas vous forcer à en parler et je vais encore moins m’immiscer dans votre vie privée. Et si vous ne voulez pas le faire, je ne vous en voudrai pas… Seulement… Enfin nous ne sommes pas encore amis, ce serait rapide mais, vous pouvez me faire confiance, même si je n’en ai pas l’air comme ça, je ne suis pas quelqu’un de mauvais… Et j’aimerai bien ne pas être le seul à me déballer ma vie…. »



Dernière édition par Benjamin Anderson le Sam 23 Mar - 16:23, édité 1 fois
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Une deuxième rencontre, pour apprendre à mieux se connaître. [PV : John] Empty
MessageSujet: Re: Une deuxième rencontre, pour apprendre à mieux se connaître. [PV : John]   Une deuxième rencontre, pour apprendre à mieux se connaître. [PV : John] Icon_minitimeDim 10 Mar - 23:50

« Il y a des personnes qui se sentent indignes d’être aimées. Elles ne prennent pas leur place et se font toutes petites, en essayant de n’ouvrir aucune brèche au passé. »

Mes yeux étaient rivés sur les livres que j'avais posé sur la table. Toute cette situation m'excitait comme une puce. Pour une fois que quelque chose d'intéressant se produisait dans ma vie, mises à part mes enquêtes... Je n'allais pas passer à côté d'une telle occasion. Et, bien que je refusais de le revendiquer, j'appréciais la compagnie de Benjamin. Elle ne m'était pas désagréable, et cela changeait de ma solitude habituelle. Je commençais à me demander si je n'avais pas été trop loin dans ma démonstration. Aurais-je apprécié, moi, que quelqu'un me jette mon passé en pleine figure ? Mais c'aurait été impossible : je ne connais personne capable d'une telle déduction. De plus, ce qui était dit, était dit. Il n'y avait pas à revenir là-dessus et, donc, je ne devais pas culpabiliser pour pareilles broutilles. J'entendis un très léger tintement dans la poche de Benjamin, signe qu'il jouait avec les objets qu'il avait volé précédemment. Des bijoux de valeurs, sans doute... Je ne fis aucune remarque. J'aurais pu l'arrêter à n'importe quel moment et les preuves n'auraient pas manquées, j'en étais sûr. Cependant, je n'avais aucune envie de lui passer les menottes et de lui réciter ses droits. Quel intérêt ? Il ne tuait personne... Et, personnellement, je n'attachais aucune importance aux objets d'arts ou de valeurs. Pour ainsi dire, et de mon point de vue, il ne faisait donc aucun mal. Ce n'était pas comme s'il était un meurtrier ou quelque chose dans ce goût là... ! La comparaison qu'il utilisa fit apparaître sur mon visage l'ombre d'un sourire. J'aimais beaucoup le célèbre détective d'Arthur Conan Doyle, un personnage qui avait tout son mérite. Je pensais lui ressembler un peu, dans le fond et dans la forme. Mais je doutais qu'il eut été violé par son père étant enfant. Cela aurait fait une trop grande coïncidence, n'est-ce pas... ? C'était tout simplement un esprit trop grand et trop logique pour que le monde le comprenne. Même son meilleur ami, le docteur Watson. Oh certes, si son enfance n'était cité nulle part dans les livres, on pouvait tout de même l'imaginer et elle n'avait pas dû être exemplaire. Au moins avait-il reçu, je pense, une éducation stricte où les sentiments n'étaient pas de rigueur. Ce n'était qu'une hypothèse parmi tant d'autres, j'imagine... Je ne pouvais pas inventer la vie de Sherlock Holmes. Le seul qui aurait eu le droit de faire cela était mort, paix à son âme !

Benjamin m'expliquait pourquoi il se sentait obligé de voler. Et je comprenais parfaitement où il voulait en venir. Je ressentais exactement la même chose que lui... Mais envers les énigmes. Elles étaient ma rogue, mon souffle de vie. Grâce à mon travail, je ne pensais à rien d'autre. Ma vie était une constante bataille pour bloquer mon passé dans un coin très reculé de mon cerveau. S'il avait suffit d'un geste pour l'effacer... ! C'était amusant, en un sens, de voir que Benjamin ressentais cette envie de dépasser ses limites en volant. Cela devait être une habitude chez lui. Une chose aussi facile que deux plus deux... J'étais de plus en plus intéressé par les propos de Ben. Toute sa personne me fascinait. Il y avait quelque chose chez lui d'attirant. Un mystère. Mes yeux brillèrent à nouveau et je ne pus, cette fois, réprimer un sourire. Je devais l'admettre : j'appréciais la compagnie de cet homme ! Autosatisfaction, mon vieux John ! Tu as bien fait de sortir ce soir. Comme quoi, l'air frais ne fait pas toujours du mal. J'imitais Benjamin et allumais une cigarette en attendant la suite de son développement. Je ne pensais pas qu'il allait me déballer sa vie comme un sage petit enfant. Moi-même – et ce même si Ben avait deviné quoique se soit de mon enfance et me l'avait dit – je n'aurais rien dévoilé. Ce n'était pas des choses que l'on pouvait raconter à tous les râteliers... Un peu mon n'veu ! Bien sûr que j'avais raison. Il préférait son père, chose évidente et ce même s'il le battait. J'étais bien placé pour le savoir... Mais il ne t'as jamais battu, toi ! Heureusement... Ou peut-être... Aurait-ce été plus supportable s'il m'avait battu ? Peut-être aurais-je trouvé cela plus « normal ». Peut-être aurais-je trouver mon père moins fou et peut-être l'image que j'avais de lui se serait brisé plus convenablement, plus doucement... Peut-être aurais-je préféré être simplement un enfant battu ? Simplement n'était pas le bon terme... Rien n'était simple, tout était compliqué. Et être battu pouvait être tout aussi horrible, tout aussi insupportable. Il n'y avait aucune situation préférable. Bien entendu, Benjamin ne voulait pas aller plus loin. Qui le voudrait ? Certainement pas moi. Je le comprenais bien... Pour une fois que je comprenais quelqu'un d'autre que moi-même ou les actes des criminels que je poursuivais... Que je comprenais quelque chose d'autre que les tics, les indices et les petits détails chez une personne ou sur une scène de crime... Ou partout ailleurs. C'était une sensation assez étrange, à dire vrai. Mais d'un autre côté, j'étais déçu. J'aurais aimé continuer sur ma lancée... M'occuper l'esprit. Tant pis ! Nous parlerons bien d'autres choses. J’attrapais distraitement un des livres que j'avais sorti de ma bibliothèque et le feuilletais un peu au hasard. Je n'étais pas un as pour changer de sujet lorsque je n'en avais pas réellement envie. Je ne faisais pas beaucoup d'efforts pour y arriver, cela dit. Il aurait été tellement intéressant de continuer l'analyse de Benjamin... Mais s'il ne le souhaitait pas... Je n'allais tout de même pas l'indisposer, n'est-ce pas ?

Je n'eus pas besoin de changer de sujet, Ben le fit pour moi. Visiblement, il semblait plutôt bavard pour quelqu'un qui ne souhaitait pas continuer une discussion. Je gardais le livre ouvert à la page trois cent deux et l'écoutais parler, penché en avant, mon index posé sur mes lèvres. Il était rare que j'écoute quelqu'un d'autre de moi-même. La vie des gens ne m'intéressaient guère. Or, celle de Ben ne m'ennuyait pas le moins du monde. Il aurait pu me parler toute la nuit, j'étais sûr que ça ne me ferait pas perdre mon temps. Mon si précieux temps déjà gaspillé par des heures de sommeil obligatoires, des heures de repas ou des congés forcés par mon supérieur. Intéressant qu'il parle de son père au passé. J'étais sûr qu'il n'était pas mort, n'est-ce pas ? Car il m'avait posé sa question au présent tout à l'heure. Si son père était mort, il aurait immédiatement employé le passé, n'est-ce pas ? Peut-être me trompais-je mais c'était peu probable. Je ne souris pas ouvertement lorsqu'il me dit qu'il était quelqu'un de désobéissant. Un imbécile l'aurait compris. Mon intérêt redoubla lorsqu'il me proposa encore de jouer aux devinettes. C'était exactement ce que je voulais faire ce soir ! Et j'avais peut-être même des chances de perdre, bien que je sois très doué dans cet art. Des frères ou des sœurs, n'est-ce pas ? Il était peu probable qu'il ait une sœur. Pourquoi ? L'intuition... N'avait-il pas tiqué en parlant de son frère ? Non, il ne l'avait pas fait. Mais il avait fait un vague geste de la main. Certes, me diriez-vous, mais il aurait pu le faire en parlant de toute autre chose aussi. Précisément. Les gestes involontaires sont produit par notre inconscient. Comme lever les yeux vers la droite lorsqu'on ment ou tiquer de l’œil... Passons. Il avait donc un frère... Ou deux ? Après tout, si sa famille était religieuse ce n'était pas le genre à se protéger pendant l'acte, n'est-ce pas... ? Je retins une grimace en me cachant derrière ma tasse de café dont j'avalais cul sec le contenu. Ouais. C'était bien connus, non ? Les gens religieux – du moins ceux comme le père de Benjamin – ne se protégeaient pas. Ainsi donc, sauf si la mère avait désobéis et prit la pilule ou d'autres moyens contraceptifs – ou encore avait eu des complications pendant l'accouchement de Benjamin – la famille devait être nombreuse... Cependant j'avais un doute. Pour ne pas trop m'avancer, je dirais donc qu'il n'avait que deux frères. Plus vieux. Il semblait être le cadet, désobéissant. Cependant, il n'avait pas de bons rapports avec ses frères. Il semblait seul... Et la famille ne faisait pas parti de son vocabulaire, n'est-ce pas ? Un peu comme moi... Sauf que, au contraire, j'aimais énormément mon frère. Simplement... Je ne savais pas comment le montrer. Quelle perte de temps, les sentiments. Quant à voler... Je ne savais pas exactement. Et ne pas savoir m'agaçait par la même occasion... ! Je détestais perdre. Je plissais les yeux et, après avoir posé ma tasse, me penchais une nouvelle fois en avant, l'index sur mes lèvres. Je saurais pourquoi... ! Il y avait une envie d'adrénaline, pour sûr, chercher à dépasser ses limites, être libre... Des choses dans ce goût là. C'était comme moi et mes énigmes : une drogue. Une chose dont on ne pouvait plus se passer. Pour penser à autre chose, peut-être ? Nous étions dans le même bateau si c'était le cas. Oh... Il aimait ce qu'il faisait, certes ! Mais au fond ça lui permettait de ne plus penser aux choses fâcheuses, n'est-ce pas ? Exemple, j'adorais mon travail. Mais je ne pouvais nier que je le pratiquais jour et nuit également pour oublier.

J'ouvris la bouche pour répondre mais, déjà, Ben repartais dans un flot de paroles. Qu'il était bavard ! Il posait des questions mais n'attendait même pas les réponses... Je refermais ma bouche et attendis qu'il ait fini. Je ne coupais la parole aux gens qui si nécessaire – dans mon travail, par exemple. L, ce n'était pas le cas. Autant qu'il parle. Les mères... Peut-être aurais-je du lui couper la parole, finalement... Je n'avais plus de café dans ma tasse. Malheur ! Que regarder à part son visage ? Et si je détournais les yeux, n'allait-il pas se douter de quelque chose ? Il faisait parti de la catégorie des êtres humains intelligents... Je me forçais donc à lever les yeux sur lui, calmement, indifférent. J'y arrivais avec un assez grand succès. Pas de sentiments. Pas de sentiments. N'étais-je pas sans cœur ? Je restais donc de marbre alors qu'il parlait de sa propre mère. Une autre devinette s'ouvrit alors. Avec quoi... ? Classiquement, un martinet, aurais-je dis. Je levais un sourcil. C'était tellement insolite comme genre de questions. Autant dire qu'on ne me la posait pas souvent. Au moins avais-je retrouvé mon calme. Pas pour longtemps, mon grand. Sa petite « boutade » ne me fit même pas sourire. Mais je marquais qu'il avait le sens de l'humour et de l'ironie à revendre. Simplement, je ne souriais pas beaucoup. Ou alors par politesse... Ou bien lorsqu'une nouvelle énigme s'offrait à moi et que je la résolvais ! Ca faisait déjà pas mal... Bip. Bip. Benjamin Anderson, vous avez un non point, bravo. Je retins un geste nerveux de ma main et m'efforçais de rester très calme. Personne ne m'avait jamais questionné sur mon passé, personne n'avait jamais su. Peter c'était peut-être vaguement douté de quelque chose – pas du fond du problème, certainement pas – mais il avait déjà ses propres soucis, je le savais. Et puis... Peter n'était plus, lui aussi, qu'un lointain souvenir. Je l'avais oublié et voilà que j'y repensais. Je le chassais sèchement de mon esprit pour remettre rapidement mes idées en place. La confiance. Je retins un rire méprisant. J'avais pour habitude de ne faire confiance qu'à moi-même en ce qui concernait les trucs sentimentaux... Ou relatif au passé. Déjà que tout cela n'était pas tasse de thé... En parlant de thé, ça faisait longtemps que je n'en avais pas pris une bonne tasse... Là, je pouvais changer de sujet, maintenant. J'en avais envie et je saurais le faire... Ou pas. T'es vraiment sûr de ne pas vouloir en parler ? Je refermais sèchement le livre encore ouvert sur mes genoux et le reposais sur la pile posée sur la table basse.

« Tout d'abord, voulez-vous une autre tasse de café ? Oui, bien sûr que vous en voulez une autre. je me levais et repris les deux tasses avant de me diriger à grand pas vers la cuisine ouverte sur le salon où nous étions assis. Je posais un peu brusquement les tasses sur le rebord de l'évier avant de les remplir de café. Je réfléchissais à toute vitesse et décidais que j’esquiverais tout simplement la question. Je revins au salon tendis sa tasse à Ben avant de me rasseoir. Ensuite... Je pense que vous avez un frère... Enfin deux, pour être plus précis... Voir trois mais je ne voudrais pas non plus miser trop haut. Étant donné que votre famille est – ou était – religieuse, comme vous le dites et comme j'en suis convaincu également, il est peu probable que vos parents se soient protégés. Ainsi, logiquement, votre famille doit être nombreuse. Sauf problèmes lors de votre naissance – car vous êtes le cadet – ou précautions de la part de votre mère : pilules, implants, … Qu'en sais-je ? Pour le vol... Je dois dire que je ne sais pas le fond du sujet. Vous devez faire ça depuis un moment puisque vous êtes un professionnel – profitez du compliment, il est gratuit – mais... Je n'en sais guère plus. Vous le faites pour l'adrénaline, vous sentir libre... Comme vous le dites, c'est une drogue. Nous sommes sans doute dans le même bateau, moi et mon travail, c'est la même chose. Et enfin... Vous devez faire cela pour vous sentir libre de vos propres choix, je suppute. Sans obéir à la loi, j'entends. Et ça vous permet d'oublier. »

Maintenant que cela était dit, j'allais devoir esquiver le reste... Je ne savais pas exactement comment faire... Peut-être me venger en lui parlant de choses peu plaisantes ? Mais ce serait assez méchant, il ne l'avait pas été avec moi. Au contraire, il voulait simplement... Pas de sentiments. Je posais sur lui mes yeux bruns et le regardais quelques secondes, en profitant pour boire une gorgée de mon café.

« J'ai oublié de préciser que vous ne devez pas avoir de bonnes relations avec vos frères. Vous êtes plutôt du genre solitaire, me trompe-je ? Et le mot famille ne fait pas parti de votre vocabulaire... Ou alors de façon péjorative. Je ne vais pas m'amuser à deviner exactement avec quoi votre père « s'amusait » à vous battre. Un martinet, je suppose ? Un fouet... Peut-être. Et je suis persuadé que votre mère était presque aussi charmante que la mienne. Jouer la carte de la demie-franchise. Elle s'appelait Mary. Plutôt stricte. L'image que l'on peut avoir d'une maîtresse d'école, voyez-vous ? Et je peux dire que les mères ne font jamais rien – non par expérience personnelle – mais simplement parce que c'est ce qu'elles font la plupart du temps dans les familles comme la votre. »

Ne pas en dire plus. Je lui fis un sourire amusé. Allait-il se rendre compte ? Oh, sans doute... Il n'était pas débile. Cela aurait marché avec n'importe qui, mais pas avec Ben, n'est-ce pas ? Je pensais ne pas me tromper. Tu es sûr de ne pas vouloir vider ton sac ?

« Je n'étais pas un enfant battu. » Loin de là. Si loin de là... Mon père, j'en étais sûr, n'aurait jamais porté la main sur moi. Il m'aimait trop pour ça. Je suppose que jouer aux devinettes n'est pas votre tasse de thé... Cependant, essayez toujours de deviner quelque chose. Parler de moi et de mon enfance n'aurait rien de passionnant, je vous le dit. Nous perdrions notre temps tous les deux, je pense. Allez-y, à votre tour. Dites-moi donc si j'ai des frères et sœurs ? Dites-moi si j'étais riche ou pauvre ? Dites-moi ce que vous voudrez, que j'value un peu votre aptitude... Car je vais vous dire : je ne vous compte pas parmi ma longue liste de gens stupides. »

C'était un compliment hors du commun venant de moi qui n'en faisait même pas à mon propre frère. Il faisait de magnifiques peintures mais je ne cessais de lui dire qu'elles ne valaient rien. Je crois que je l'enfonçais un peu plus en lui disant de telles choses... Mais j'étais incapable de lui dire quelque chose de gentil. Un blocage affectif, dira-t-on. Je murmurais – avait-il entendu ? – ces quelques mots avant de prendre une gorgée de café :

« Qui suis-je ? » Personne ne l'avait jamais vraiment compris. Les gens n'avaient que quelques traits de caractères par-ci, par-là. J'étais sûr que Ben pourrait être le premier à comprendre et à me donner une réponse. Car peut-être l'ignorais-je moi-même, en parti.
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